Pari gagné pour les syndicats. Selon que les chiffres viennent du ministère de l’Intérieur ou de la CGT, un à deux millions de Français seraient descendus dans la rue, jeudi 19 janvier, pour protester contre la réforme des retraites. Outre les manifestations, la contestation s’est traduite par des grèves dans les transports, les écoles, et la fonction publique. Une mobilisation que 70% des Français qualifient de «succès», comme le révèle notre sondage Odoxa-Backbone Consulting pour Le Figaro. Même parmi les sympathisants Renaissance (66%) ou LR (54%), pourtant favorables au report de l’âge légal de départ à 64 ans, une majorité de sondés constate la réussite de la journée de mobilisation. «C’est une mobilisation importante. Nous savions qu’elle le serait. (…) Il faut écouter les messages dans les cortèges», a reconnu de son côté le ministre ex-PS du Travail, Olivier Dussopt, dès jeudi.

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Alors que la chef du gouvernement Élisabeth Borne doit présenter son texte lundi 23 janvier en Conseil des ministres, seuls 41% des Français pensent que l’exécutif restera «droit dans ses bottes» et maintiendra sa réforme «sans rien y changer». Pour 47% des Français, la démonstration de force pourrait à l’inverse contraindre le gouvernement à revoir sa copie. «Le fait que les Français, surtout les plus mobilisés contre la réforme, pensent à présent que la mobilisation permettra d’obtenir quelque chose – retrait ou modifications importantes – change sans doute la donne», décrypte le président d’Odoxa, Gaël Sliman. Une petite minorité (12%) croit ainsi que le gouvernement devra carrément «abandonner» sa réforme. Sans surprise, les sympathisants de gauche (71% à LFI et au PS) croient très majoritairement à «la victoire» de la rue. «Le gouvernement a perdu sa première bataille», a brandi le leader de La France Insoumise, Jean-Luc Mélenchon, présent jeudi dans le cortège marseillais.

Entre l’exécutif et les syndicats, le bras de fer social ne ferait d’ailleurs que commencer. La mobilisation est soutenue à «un niveau très élevé», souligne Gaël Sliman, qui l’estime à deux tiers des Français (66%). Parmi eux, un sur cinq (18%) assure même y participer «d’une manière ou d’une autre». Lors des fameuses grèves de 1995 contre la réforme des régimes spéciaux de retraite, portée par Alain Juppé, ils n’étaient en comparaison «que» 54% à «soutenir» ou à «avoir de la sympathie» pour le mouvement. Et «seulement» 53% à 56% en 2019, lors de la mobilisation contre la première tentative de réforme macroniste des retraites, portée à l’époque par Édouard Philippe.

Un fort soutien qui ne devrait pas s’effriter à l’aune des prochains rendez-vous, à savoir : la marche organisée à l’initiative de La France Insoumise ce samedi 21 janvier ; mais surtout la nouvelle journée de mobilisation, prévue le mardi 31 janvier. Une écrasante majorité (89%) de ceux qui soutiennent la protestation assurent qu’ils la soutiendraient toujours si le pays devait connaître des blocages importants dans les semaines à venir. D’autant que les Français semblent pour l’instant épargnés par les conséquences de la grève : seuls 16% d’entre eux disent avoir été perturbés dans leurs déplacements. Si les autorités redoutaient des scènes de chaos semblables à celles des «gilets jaunes», les manifestations se sont par ailleurs déroulées sans heurts majeurs.