Une titularisation qui peut surprendre. Danièle Obono a été confirmée titulaire à la Cour de justice de la République, le 18 octobre dernier, jour de la publication officielle de la composition de la juridiction d’exception sur le Journal officiel. La députée insoumise avait déjà été élue en juillet 2022 pour siéger au sein de l’institution. Avec nombre de ses homologues de l’Assemblée nationale, l’élue a pour mission de juger les crimes et les délits commis par les membres du gouvernement dans l’exercice de leurs fonctions.

Cependant, cette confirmation intervient alors que la députée se trouve au cœur d’une polémique, dans le cadre du conflit entre Israël et le Hamas, le groupe terroriste palestinien qui a mené une attaque sanglante contre l’État hébreu le 7 octobre dernier. Danièle Obono a en effet affirmé mardi dernier, au micro de Sud Radio, que l’organisation islamiste était «un mouvement de résistance», provoquant nombre de réactions négatives de la part de la classe politique.

«C’est un groupe politique islamiste qui a une branche armée, qui s’inscrit dans les formations politiques palestiniennes, qui a pour objectif la libération de la Palestine, qui résiste à une occupation, qui se définit comme tel et qui est reconnu comme tel par les instances internationales», a-t-elle encore martelé.

Dans la foulée, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin a décidé de saisir la justice pour «apologie du terrorisme». L’association Jeunesse Française juive a également annoncé porter plainte sur X en affirmant : «Nous déposons plainte contre Danièle Obono pour apologie de terrorisme. Fini de jouer.»

D’autres réactions politiques n’ont pas tardé à pleuvoir, y compris au sein de la Nupes qui se divise sur le sujet de la qualification du Hamas depuis le début de la guerre. Marine Tondelier, secrétaire nationale d’Europe Écologise-les Verts, a tancé sur X : «Bon maintenant, ça suffit», a-t-elle publié en rejetant fermement la notion de «résistance».

En réponse, la députée de la France insoumise a interpellé la secrétaire d’EELV en l’appelant «Marine “Karen” Tondelier» sur X. Le prénom «Karen», utilisé ici comme une insulte, désigne de manière péjorative une femme blanche d’un certain âge, issue de la classe moyenne, qui s’insurge de tout et qui, surtout, perpétue un racisme systémique. Il a été choisi en raison de sa prédominance dans les années 1960 et 1970 au sein des familles blanches aux États-Unis.

«*Marine « Karen » Tondelier va demander à voir mon superviseur (qu’elle s’imagine être soit Manuel Bompard, soit Jean-Luc Mélenchon) pour essayer de me faire virer*.», s’est donc moquée Danièle Obono sur X. La vive passe d’armes n’est pas passé inaperçue sur les réseaux sociaux : le tweet de la députée LFI a été lu plus de 600.000 fois.

Mais les Verts n’ont pas été les seuls à s’insurger, les socialistes ont également souhaité réagir. «Quelle honte», a fustigé le maire PS de Rouen, Nicolas Mayer-Rossignol. «Non, la gauche claire ne peut pas travailler avec des personnes qui tiennent de tels propos», a-t-il insisté. Le député PS Jérôme Guedj a même annoncé ne plus vouloir siéger à l’intergroupe de la Nupes après cette sortie de Danièle Obono. Pour lui, cette dernière constitue une «raison de plus» pour mettre fin à l’alliance de gauche.

La majorité n’a de son côté pas mâché ses mots. La ministre des Solidarités et des Familles, Aurore Bergé, s’est insurgée : «Ils ont égorgé des bébés. Ils ont éventré des femmes enceintes. Ils ont décapité des vieillards. Ils ont massacré des familles. Ce sont des terroristes. Des terroristes islamistes. C’est le même fléau que nous combattons, dans toutes les démocraties», a-t-elle publié sur X. Avant de trancher : «Vous n’êtes qu’une honte». Plus à droite, le patron des LR, Éric Ciotti, a demandé «des sanctions et la levée de l’immunité parlementaire de la députée Obono pour apologie du terrorisme».

Plus récemment encore, le journal satirique Charlie Hebdo a lui aussi décidé de réagir aux propos de l’élue parisienne sur le Hamas. Le média, qui a été la cible de plusieurs attaques terroristes ces dernières années, a publié une caricature représentant Danièle Obono confrontée à des otages israéliennes capturées par le Hamas. Avec un commentaire : «Gaza/Israël : la paix c’est possible ! La France échange Obono contre les otages israéliens.»

Cette publication a fait bondir les Insoumis qui ont réagi à l’unisson en déclarant le dessin «raciste» et «antisémite». Mathilde Panot, chef de file des LFI à l’Assemblée, a affirmé sur X que la caricature était «à gerber». «Le dessin de Charlie Hebdo se la joue « temps béni des colonies », et signe tranquillement le retour des caricatures racistes et antisémites». Audience toute trouvée avec Fdesouche qui partage immédiatement. On vous gêne pas, les racistes ?», a-t-elle interrogé avec colère. «C’est digne du pire des torchons d’extrême-droite !», a pour sa part jugé la députée du Val-de-Marne Rachel Kéké.