Envoyé spécial à Condé-sur-Noireau
Après son départ de Matignon, Élisabeth Borne s’est accordée quelques jours de vacances au Maroc et «a beaucoup consulté» à Paris. Pour «réfléchir», indique son entourage. Que pense-t-elle aujourd’hui de la crise provoquée par François Bayrou au sein de la majorité et du remaniement définitif qui se fait attendre ? «Face aux enjeux du pays, je suis convaincu que l’unité de la majorité est essentielle. Chacun doit donc avoir en tête de conserver cette unité. On a donc besoin du MoDem. Et on a besoin de François Bayrou», a-t-elle répondu cet après-midi au Figaro, en marge d’un premier déplacement dans sa circonscription normande.
Rendez-vous avait en effet donné un peu plus tôt dans la matinée, dans la bien nommée rue des Drakkars, où un ciel bas et pluvieux menaçait alors la douzaine de journalistes faisant le pas de grue devant la nouvelle école de couture de la zone industrielle Relier. Nous sommes bien en Normandie, à Condé-sur-Noireau, dont les panneaux d’entrée de la départementale D562 sont toujours retournés en guise de soutien au mouvement des agriculteurs. Au cœur du bocage normand, gras et gorgé d’eau. Plus précisément dans sa circonscription, la 6e du Calvados. Un mois, moins un jour exactement, depuis son départ de Matignon, l’ancienne première ministre avait donc décidé de reprendre attache avec sa terre d’élection ce jeudi avant de retrouver, la semaine prochaine, les bancs du Palais Bourbon.
«Il y a différentes façons de s’engager en politique. Je suis très heureuse de retrouver ma circonscription», a-t-elle martelé lors de la visite d’une école de mode, Fil en Normandie. Compte-t-elle être une députée assidue sur les bancs de l’Assemblée ? «Je serai une députée à plein temps et je peux vous assurer que je suis très heureuse de retrouver les députés de la majorité avec qui j’ai beaucoup travaillé ces deux dernières années. Surtout, comme je n’ai pas l’habitude de faire les choses à moitié, je peux aussi vous dire que je continuerai à me battre pour mes convictions… »
Après s’être essayée à quelques points de coutures sous l’œil expert d’une élève, Élisabeth Borne s’est ensuite offerte une déambulation entre les étals du marché de Condé-sur-Noireau, où elle a reçu un accueil poli, mais sans réel enthousiasme. Presque dans l’indifférence des badauds. «Première ministre ou députée, rien ne chargera pour nous», grince Fabrice, un quinquagénaire désabusé, son sac de courses sous le bras. Tandis qu’un autre chuchotait des « 49.3, 49.3…» sur son passage. Saluant là le marchand de fromage, ici le poissonnier, la députée fait bonne figure, achète un pain bio plus loin, demande encore comment vont les affaires à un autre. Une femme, enfin, sollicite un selfie. Élisabeth Borne se prête au jeu tout sourire.
À quelques pas d’elle, quelques militants de la France Insoumise distribuent des tracts et persiflent sur la venue de la députée Borne. «Ce n’est pas un retour… parce qu’elle n’a jamais été là !», grince Noë Gauchard, ancien candidat LFI aux législatives. «Faux, la première ministre est régulièrement venue en circonscription lorsqu’elle était encore à Matignon. En tout, une cinquantaine de fois en comptant la campagne de 2022…», corrige une collaboratrice.
Devant une trentaine d’élus locaux, réunis pour un buffet debout dans un salon de la mairie de Villers-Bocage, Élisabeth Borne a en tout cas réaffirmé son attachement à sa circonscription : «Je me réjouis de revenir régulièrement. J’en profite aussi pour remercier mon suppléant, Freddy Sertin, qui m’a toujours relayé vos préoccupations, que je connais. Cette circonscription, avec son périurbain et sa forte ruralité, fait écho à beaucoup de difficultés que rencontre le pays…», a-t-elle martelé, avant de se rendre sur une exploitation agricole à Maizet pour un échange avec des représentants de la FNSEA et des JA.