Après plusieurs jours d’émeutes et de profonde violence à travers la France, l’heure semble être désormais au calme. C’est du moins ce que les ténors des Républicains (LR), bien que prudents, avancent ce 6 juillet, lors d’une conférence de presse. Au siège du parti, Éric Ciotti, aux côtés de Bruno Retailleau et d’Olivier Marleix, juge ainsi qu’« au-delà des mots et des discours », il est désormais temps de « passer à l’action ». Alors, assure-t-il, Les Républicains ont un « plan pour rétablir l’ordre public ».
Et si la droite a, « dans un esprit de responsabilité », « soutenu l’action de l’État, l’action des forces de l’ordre, de ceux qui les dirigent et donc, du ministre de l’Intérieur », le parti poursuit sa critique de la politique sécuritaire du gouvernement. « Nous devons rompre avec l’impuissance », estime Éric Ciotti. « Il y a une colère légitime des Français qui réclament une volonté ferme de la part de leurs responsables politiques » et non « une énième stratégie de communication ». « LR porte cette exigence. »
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À l’image de ses deux propositions de loi sur l’immigration, la droite entend désormais porter un texte « pour une justice plus ferme ». « Nos propositions sont prêtes. » Parmi elles, l’augmentation de la capacité carcérale avec un objectif de 80.000 places de prison, et le doublement du nombre de centres éducatifs fermés pour les mineurs, d’ici à 2027 ; l’instauration des peines planchers dès le premier délit pour les dépositaires de l’autorité publique ou encore, la mise en place d’un dispositif de courtes peines effectives, en priorité pour les mineurs.
Et pour répondre à la délinquance des plus jeunes, LR propose d’« installer, comme pour les adultes, des comparutions immédiates », la suppression de l’excuse de minorité et l’abaissement de la majorité pénale à 16 ans. Manière aussi pour la droite, qui n’a cessé de durcir le ton depuis les émeutes, de continuer à pointer du doigt « l’immobilisme » du gouvernement qu’elle accuse de s’enfoncer dans une forme de « déni ».
« Cet embrasement est un tournant », insiste Bruno Retailleau. « Ce qu’il faudra reconstruire, c’est tout ce qui a été déconstruit pendant des années : là se trouvent les racines du mal », juge le chef de file des sénateurs LR, citant pêle-mêle la défaillance de l’école « qui ne transmet plus ni savoir, ni valeurs républicaines » et de l’autorité parentale. La droite propose de rétablir la suspension des allocations familiales pour absentéisme scolaire et actes de délinquance d’enfants mineurs. En confrontant ses propositions à celles du camp présidentiel, LR entend « soumettre les macronistes à l’épreuve de la vérité ». « Cela nous permettra de voir si le projet gouvernemental est à la hauteur ou si ce sont simplement des annonces », conclut Bruno Retailleau.
Mais, à droite, ce programme n’est pas au goût de tous. « Comme on a voulu être original, on a proposé le retour de l’uniforme à l’école », déplore un observateur. « C’est du recyclage… », souffle un élu LR. « Je suis le dernier député de droite élu en banlieue et vous croyez que j’ai été sollicité ? », s’offusque Alexandre Vincendet. Aux yeux de l’élu du Rhône, qui assume ouvertement la nécessité pour LR de travailler avec l’exécutif, ces mesures, « ça fait vraiment voiture-balai de toutes les propositions de loi qu’on a déjà déposées par le passé ». « Le retrait de la nationalité, franchement… C’est digne du FN et non d’un parti de gouvernement. Ce n’est pas parce que Marine Le Pen est restée silencieuse qu’il faut être encore plus outrancier ! » Dans l’entourage d’Éric Ciotti, l’on balaie ces critiques : « Depuis quelques mois, on a beaucoup moins de brebis centristes. »
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Et dans le brouhaha des interventions médiatiques, il est une phrase qui, chez certains, ne passe pas. Évoquant les auteurs de violences issus de l’immigration, Bruno Retailleau a, sur Franceinfo, déclaré : « Certes, ce sont des Français, mais ce sont des Français par leur identité. Malheureusement pour la deuxième, la troisième génération, il y a comme une sorte de régression vers les origines ethniques. » Un élu de droite s’interroge : « Je ne comprends pas bien… C’est d’une violence… » Alexandre Vincendet insiste : « Quand on ramène les gens à leur couleur de peau, cela porte un nom. Et pour reprendre les mots de Jacques Chirac, lors de son discours du Vél’ d’Hiv’ : “Rien n’est insignifiant, rien n’est banal.” » Interrogé, Bruno Retailleau juge que ses propos se « situent » non pas « par rapport au RN mais par rapport à (s)es convictions ».
Armée de ce « plan », la droite entend bien reprendre la main sur les thèmes régaliens. Et parmi la vingtaine de mesures présentées figurent donc celles de la déchéance de nationalité pour les binationaux condamnés pour crimes, l’expulsion automatique des étrangers majeurs coupables d’un crime ou délit mais aussi, l’impossibilité pour un mineur ayant fait l’objet d’une condamnation inscrite au casier judiciaire d’obtenir la nationalité française par le droit du sol une fois ses 18 ans atteints. Un nouveau durcissement tandis qu’entre LR et l’exécutif, les discussions autour de la loi immigration restent au point mort. « Le gouvernement se cache les yeux pour évacuer cette question », fustige Retailleau.