«Vous êtes une honte.» «Vous mentez pour exciter la rue.»«Vous êtes indigne.» Lundi, à l’Assemblée nationale, c’est sous une avalanche d’invectives et dans une ambiance délétère que Mathilde Panot conclut sa prise de parole sur la situation au Proche-Orient. Rouge de colère, la patronne du groupe Insoumis regagne sa place, sous les applaudissements des parlementaires de son camp, et sous les cris exaspérés de ceux de la majorité et de la droite de l’Hémicycle.

Pendant dix minutes, elle vient de tempêter contre l’exécutif, qu’elle accuse d’être «aligné sur les États-Unis et le gouvernement israélien d’extrême droite» «La France de Darmanin est devenue le pays où le seul crime de Benzema est de s’appeler Karim», a-t-elle également lancé, en référence aux propos du ministre de l’Intérieur à l’encontre de l’international français, qu’il accuse d’être lié aux Frères musulmans. La fin de l’intervention de l’Insoumise en chef est inaudible, totalement couverte par les indignations d’une large partie de l’Hémicycle.

Ces débats, convoqués par la première ministre au titre de l’article 50.1 de la Constitution, étaient attendus. Déjà évoqué au cours des deux dernières séances de questions au gouvernement, le conflit israélo-palestinien voit la classe politique se déchirer depuis l’attaque terroriste du Hamas, il y a maintenant plus de deux semaines.

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Ce week-end, les invectives entre personnalités politiques ont atteint un niveau rarement vu sur X (anciennement Twitter), lorsqu’en déplacement dans le kibboutz de Beeri et à Réim, la présidente de l’Assemblée, Yaël Braun-Pivet, a déclaré qu’«Israël est légitime à se défendre, dans le respect du droit international». Une phrase qui a attisé la très vive colère des Insoumis, parmi lesquels, l’omniprésent Jean-Luc Mélenchon. «Pendant ce temps, Madame Braun-Pivet campe à Tel-Aviv pour encourager le massacre», a-t-il ciblé, regrettant que l’occupante du perchoir n’ait pas «un mot de compassion pour les populations enfermées à Gaza».

«Je suis convaincue que le mot “camper” n’a pas été choisi par hasard (par Jean-Luc Mélenchon, NDLR). Et le fait que je “favorise le massacre”, c’est une nouvelle cible que l’on me met dans le dos. C’est très grave», a réagi, lundi matin, Yaël Braun-Pivet sur France Inter.

Dans l’Hémicycle, les propos de Jean-Luc Mélenchon sont fermement dénoncés par plusieurs orateurs, dont la députée LR Michèle Tabarot. «Honte à ceux dans cet Hémicycle qui refusent de les appeler terroristes (Le Hamas), qui osent qualifier ces criminels de résistants, qui font sauter les digues de l’antisémitisme», tance l’élue des Alpes-Maritimes, sous une large ovation boudée par les rangs de la gauche.

Un peu plus tôt, la première ministre a longuement pris la parole. Rappelant la position historique de la France d’une «solution à deux États», Élisabeth Borne condamne ceux qui «minimisent, justifient voire absolvent le terrorisme». «Nous ne devons faire preuve d’aucune ambiguïté face à de tels crimes (…). Ceux qui confondent le droit des Palestiniens à avoir un État et la justification du terrorisme commettent une faute politique et morale. (…) Ils ne servent en rien la cause palestinienne», lance-t-elle également, malgré les nombreuses interpellations des parlementaires LFI.

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La séance est également marquée par la prise de parole du président de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée, le député MoDem Jean-Louis Bourlanges. «L’agression conduite par le Hamas est à la fois terroriste, constitutive d’un crime de guerre généralisé et adossée à un discours à caractère génocidaire assumé», lance-t-il.

Avant de condamner également la «politique de colonisation d’Israël». Comme un seul homme, tous les élus de la Nupes se lèvent et ovationnent le parlementaire de la majorité. Ses camarades, eux, sont plus mitigés: si certains applaudissent franchement, d’autres ne cachent pas leur désapprobation… Signe que même dans les rangs de la majorité, la question israélo-palestinienne divise bel et bien.