On comprend mieux L’Amour chez les autres (How the Other Half Loves), comédie d’Alan Ayckbourn, en la voyant qu’en lisant l’argument. Sur le plateau divisé en deux, deux décors d’appartements, l’un plus moderne que l’autre (choix judicieux d’Emmanuelle Roy). C’est celui de Fiona et Franck Foster (Virginie Hocq et Jonathan Lambert). La table de la salle à manger se prolonge dans le logement de Terry et Bob Phillips (Julie Delarme et Arié Elmaleh). On apprend vite que Fiona et Bob ont une liaison. Chacun est aux aguets quand la sonnerie du téléphone retentit.
Soupçonnés d’infidélité par leurs conjoints respectifs, ils prétendent qu’ils ont passé la soirée à consoler un collègue, William Chestnutt (Andy Cocq), soi-disant trompé par sa femme Marie (Sophie Bouilloux). Interloqués, Terry et Franck invitent le couple à dîner. Branle-bas de combat chez ces bourgeois moyens dont les hommes travaillent dans la même entreprise. Répliques efficaces, les rebondissements et les allers-retours des protagonistes qu’on ne découvre pas sous leur meilleur jour. Les portes claquent joyeusement. Il y a du Feydeau chez l’auteur anglais le plus joué dans son pays, après Shakespeare.
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L’Amour chez les autres rassemble des malheureux qui tentent de sauver les apparences. Ou choisissent au contraire de lâcher prise. Mère d’un bébé, chevelure désordonnée, abandonnée à son sort, Terry Phillips laisse la poussière s’accumuler. À l’inverse, Fiona Foster a toujours une chemise propre pour son époux. Chapeau à plume sur la tête, elle a l’air débordé, mais elle brasse surtout du vent. Comment elle et Bob sortiront-ils du pétrin ?
Les mensonges des uns et des autres enveniment la situation, les alibis s’effondrent comme des châteaux de sable, la mauvaise foi est reine. Voici une pagaille organisée sans souci de vraisemblance et c’est tant mieux. La tâche était compliquée pour Marie-Julie Baup qui a adapté à la sauce française la comédie d’Alan Ayckbourn, 84 ans. L’actrice s’en sort avec les honneurs. Quant à Ladislas Chollat, il a déjà monté plusieurs de ses pièces. Sous sa férule, le spectacle est mené à un train d’enfer.
Les comédiens vibrionnent et amusent, ils se renvoient la balle sans temps mort. L’association de la grande Virginie Hocq au « petit » Jonathan Lambert fait des étincelles. Il y a de la Pacôme et du Petit Blond dans leur comique. À l’aise sous des costumes inhabituels, Julie Delarme et Arié Elmaleh n’ont rien à leur envier. De même, derrière ses lunettes, Sophie Bouilloux et Andy Cocq, avec son regard éperdu, jouent à ravir les êtres dépassés par les événements. Un divertissement aux petits oignons.
L’Amour chez les autres , au Théâtre Édouard-VII (Paris 9e). Tél. : 01 47 42 59 92 ou theatreedouard7.com
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