Animation de Tibor Banoczki et Sarolta Szabo, 1h52
En 2123, toute vie animale et végétale a disparu de la surface terrestre désormais stérile, asséchée et dévastée par une crise climatique. À Budapest, les habitants survivent sous cloche, protégés par un dôme en verre. Du moins jusqu’à leurs cinquante ans. Une fois cet âge limite atteint, on leur implante une graine dans le cœur pour les transformer en arbre dans des abris sécurisés. La récolte des feuilles, ensuite séchées, gélifiées et aromatisées, permet de nourrir ceux qui restent. Psychologue de profession, Stefan est là pour accompagner les proches après chaque départ, leur rappeler la valeur du sacrifice laissé par l’absent. Pourtant, lorsque Nora, sa femme restée inconsolable depuis la mort de leur fils, se porte volontaire pour être implantée bien avant l’heure, il est prêt à tout pour la libérer du centre où elle a été emmenée, pour empêcher l’inéluctable transmutation qui a déjà commencé. Notre avenir dans un siècle imaginé par les deux réalisateurs n’est guère réjouissant, entre cannibalisme déguisé et paysages hostiles ravagés, traversés par des orages puissants. Mais Sky Dome 2123 réserve de belles surprises en marquant sa singularité. Plus qu’une dystopie politique, ce film écologique post-apocalyptique est avant tout une histoire d’amour poignante dans un monde condamné où l’homme n’a plus sa place. V.B.
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Drame de Dani Rosenberg, 1h38
Shlomi jette le gant. À 18 ans, il est soldat dans la bande de Gaza. Il en a assez. Ni une ni deux, le voilà qui déserte. Ce coup de tête le propulse à Tel-Aviv où il veut rejoindre sa petite amie qui travaille dans un restaurant. Le but est de lui demander sa main. Entre ses fiançailles et l’avenir de son pays, il n’y a pas à hésiter. Sous ses nouveaux habits, Shlomi sillonne la ville où les gens continuent à vivre comme si de rien n’était. Dehors, les sirènes retentissent. Les habitants sont accoutumés à ce bruit de fond. Les autorités pensent – ou feignent de penser – qu’il a été kidnappé par le Hamas. La nouvelle passe en boucle sur les chaînes d’info continue. Sur le petit écran, les commentateurs le prennent pour une victime, pour un héros. Il sait ce qu’il en est au juste. Cela l’oblige à déployer des ruses de Sioux. De son métier, il a gardé la pratique. Il se cache, se fond, dans le décor, sème ses poursuivants. L’humour et l’absurde ne sont pas absents de cette fuite en avant menée staccato, sur une musique tambourinante. Le film bouillonne d’énergie, à l’image de ce jeune homme qui se jette sur la nourriture avec une avidité communicative. É.N.
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Thriller de Julien Maury et Alexandre Bustillo, 1h50
Tout commence par le terrifiant double homicide d’un couple dans un petit village des Vosges. Deux enquêteurs sont dépêchés pour résoudre cette affaire particulièrement sanglante. La commandante Élisabeth Guardiano (Virginie Ledoyen) rechigne à faire équipe avec un capitaine de gendarmerie (Paul Hamy) qui, lui, a fait le déplacement pour enquêter sur une série de disparitions d’enfants… Ils vont cependant être obligés de faire équipe, face à la tournure que prennent certains événements. De nouveaux crimes ont lieu, laissant entrevoir la présence irrationnelle de légendes occultes locales, notamment celle d’un certain « Mangeur d’âmes », sorte de croquemitaine vosgien. Spécialistes de cinéma d’horreur et d’épouvante, le tandem Julien Maury et Alexandre Bustillo profite de l’adaptation du thriller d’Alexis Laipsker pour s’essayer au polar horrifique. Bien sûr, on pense souvent aux Rivières pourpres, mais aussi à l’atmosphère étrange et inquiétante de Litan, l’étrange polar fantastique de Jean-Pierre Mocky. Efficace et bien joué, Le Mangeur d’âmes se laisse regarder sans ennui. Mais il manque un peu d’originalité au niveau de la mise en scène. O.D.
Drame de Luca Guadagnino, 2h11
Le scénario de Justin Kuritzkes imagine deux amis dans la vie et rivaux sur le court. Patrick (Josh O’ Connor, le jeune prince Charles de The Crown) et Art (Mike Faist), encore étudiants, flashent sur Tashi (Zendaya), future championne. Les trois sportifs fricotent le temps d’une soirée sous le signe du triolisme soft avant que Patrick n’emporte le joli morceau. Art attend son heure, et elle ne tarde pas à venir. Coté court, Tashi se blesse gravement et renonce à sa carrière. Elle devient la femme-coach-manager intraitable d’Art. Les années passent. Après avoir tout gagné, Art est au creux de la vague. Patrick végète dans des tournois de seconde zone. Les deux hommes se retrouvent en finale de l’un de ces tournois (les challengers), pour se (re)lancer avant l’US Open. Ce Jules et Jim pop et queer ne bouleverse pas le genre. Zendaya ne tire pas les ficelles, elle tient la chandelle. É.S.
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Biopic de Sam Taylor-Johnson, 2h02
Souvent, la réalité dépasse la fiction. Et la vie réelle des musiciens vaut bien mieux que celle vendue par les biopics. La médiocrité de certains d’entre eux est telle qu’on aurait presque envie d’imposer un moratoire sur leur production. Il faut pas mal de cran pour proposer une version cinématographique de la vie tragique de la géniale chanteuse britannique quand un documentaire aussi excellent qu’Amy, qui lui a été consacré en 2015, existe. Pourtant, les producteurs de Back to Black ont jugé opportun de mettre en scène la brève existence (vingt-sept ans de vie terrestre) de la chanteuse britannique la plus phénoménale du début de ce siècle. C’est à la pâlotte Marisa Abela qu’incombe ce rôle. À aucun moment l’actrice n’est capable de se hisser à la hauteur du personnage, déglingué, certes, mais passionnant et surtout singulièrement attachant. Dans le film, Amy Winehouse est réduite à une succession de clichés. Le film s’appesantit sur la vie personnelle de l’artiste. Il y a beaucoup à dire mais tout cela sonne très faux. Quant à la mise en scène, elle est quasi inexistante. On s’ennuie copieusement au visionnage de ce film à l’esthétique cheap, qui fait d’Amy Winehouse ce qu’elle n’était pas : un personnage banal et prévisible. O.N.
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