L’histoire de cette production mérite d’être contée. Chaque été, le festival Verdi à Parme commande à un metteur en scène une nouvelle version d’un des 26 opéras de Verdi. En 2020, Un Ballo in maschera est confié au britannique Graham Vick, que la Covid-19 emportera quelques mois plus tard, le 17 juillet 2021, à quatre semaines des répétitions.
Pour lui rendre hommage, le festival a demandé à l’un de ses assistants, Jacopo Spirei, de poursuivre le travail du maître. Il a maintenu à ses côtés Richard Hudson, décorateur et costumier de renom (il recevra en avril un Awards à New York pour l’ensemble de sa carrière), qui avait noté les desiderata de feu Graham Vick pendant la phase de réflexion et de préparation de cette production désormais posthume.
Le résultat est exemplaire. Tout d’abord le décor, tout simple, qui magnifie l’action et le chant. Une scène penchée à l’extrême à la façon des théâtres à l’italienne pour accentuer l’impression de perspective. Un rideau blanc en demi-cercle en toile de fond. Des portes qui s’ouvrent et se ferment selon les besoins de la dramaturgie. Une stèle noire qu’on déplace au fil de l’action.
La prophylaxie des années Covid interdisant que l’excellent chœur se tienne en scène, il a été installé à mi-hauteur, sur une sorte de balcon traversant, arrondi, très Bauhaus. Le jeu des chanteurs y gagne en puissance et en intensité. Une troupe de danseurs vient donner une touche un peu cabaret à cet ensemble très limpide, manière de rappeler que Gustave III, dont l’assassinat lors d’un bal masqué avait inspiré la première version du livret, avait de nombreux favoris.
Seul bémol à cette production, les lumières parfois un peu premier degré ne suggèrent ni le mystère ni le drame. Les deux distributions, qui sont excellentes, ont été acclamées par un public enthousiaste. L’orchestre du Liceu sous la direction de Riccardo Frizza sait révéler toutes les nuances de cette œuvre. Du bel ouvrage.
Gran Teatre del Liceu à Barcelone jusqu’au 20 février.