«Je peux vous demander de vous mettre nue à tout moment, et j’ai besoin d’une actrice qui le fasse, car c’est ce que la victime aurait fait pour rester en vie». Selon l’une des deux plaintes déposées auprès de la Screen Actors Guild (syndicat des acteurs américains), ces propos auraient été tenus par Vincent Gallo envers une actrice ayant passé le casting du film The Policeman, pour jouer l’une des victimes féminines du tueur en série Joseph James DeAngelo.
Réalisé par Jordan Gertner, The Policeman met en scène le tristement célèbre Golden State Killer. Joseph DeAngelo de son vrai nom, est un ancien policier américain et tueur en série qui a sévi dans les années 1970 et 1980 en Californie. Un rôle qui convenait parfaitement à Vincent Gallo, connu pour ses projets controversés et audacieux. Son film The Brown Bunny (2004) a été critiqué après ses débuts en 2003 au Festival de Cannes en raison d’une scène de sexe non simulée entre lui et Chloë Sévigny.
Selon les témoignages de deux actrices, qui souhaitent rester anonymes, l’américain de 62 ans aurait un peu trop pris à cœur son nouveau personnage. «Si je te dis de me sucer la bite ou je te tue, je te veux toi la personne, pas toi le personnage, pas toi l’acteur, mais toi, qui crois vraiment que tu mourras si tu ne fais pas ce que je dis», aurait lancé Vincent Gallo lors des auditions en novembre 2023. Dans une seconde plainte déposée auprès de la Screen Actors Guild (SAG), une deuxième actrice affirme avoir payé les frais des fantasmes de l’acteur et réalisateur.
Les deux femmes affirment que les commentaires de Gallo les ont incitées à ne pas accepter de rôles dans The Policeman. La SAG a alors affirmé à Rolling Stone qu’une enquête était en cours sur les allégations de commentaires inappropriés et sur le processus de casting du film. Selon le porte-parole de la SAG : «la directrice de casting a dit aux acteurs avant leurs réunions de rappel et leurs auditions qu’une coordinatrice de l’intimité SAG-AFTRA était embauchée pour le film et qu’elle serait impliquée dans toutes les scènes dans lesquelles de la nudité ou de la sexualité devait se produire.» De son côté, la société de production de film, Pacific Media Productions, affirme que «la production du film s’est déroulée dans un environnement sûr et, protecteur et respectueux».
Pourtant, les deux artistes ayants portées plainte affirment bien le contraire en livrant des détails de leurs conversations avec Vincent Gallo. L’une d’entre elles, qui postulait pour jouer une victime féminine violemment violée et torturée psychologiquement par le personnage de DeAngelo, dénonce des «fantasmes de tortures pornographiques» de la part de l’acteur. «Il m’a ensuite dit que l’environnement de tournage qu’il souhaitait créer était entièrement improvisé.» Il avait ensuite insisté sur le fait que l’actrice devrait «être à la merci de tout ce que son personnage décide de me faire à tout moment.»
Visiblement très attaché à respecter les traits les plus fins du caractère de DeAngelo, Vincent Gallo aurait expliqué que le tueur en série était «excité par la peur de sa victime (…), il créait constamment un environnement de terreur et de vulnérabilité pour inspirer les actions de son personnage sur et en dehors du plateau». Bien qu’il ait assuré à l’actrice qu’elle serait «physiquement en sécurité» et qu’il n’y aurait pas de «véritable pénétration, échange de fluides ou fellation» pendant le tournage, la plainte indique que l’actrice n’aurait «aucune négociation» sur ce qui lui était fait en plateau. Elle devait donner son «consentement général» avant le tournage du film. «Afin de raconter véritablement l’histoire de manière précise, il avait besoin d’actrices prêtes à ce que leur esprit et leur corps soient dominés à 100 % par lui dès leur arrivée sur le plateau», mentionne-t-elle dans sa plainte. Après avoir fait parvenir à la production du film une lettre indiquant ses limites de «deux ou trois actes sexuels très spécifiques», cette dernière s’est vue refuser le rôle.
Interrogé par Rolling Stone, un représentant de Gertner et Pacific Media Productions a déclaré que les allégations concernant des remarques inappropriées avaient été prises «très au sérieux» et qu’un coordinateur de l’intimité de Sag-Aftra avait finalement été embauché pour la production.
De son côté, la société en charge du casting soutient s’être «durement battue en coulisse pour les interprètes et les résultats de ces efforts peuvent être attestés par les rapports positifs du tournage. Nous remercions les actrices pour leur courage de se manifester et exprimons nos plus sincères excuses pour leur expérience, qui était effectivement une première pour nous aussi». Enfin, la participation de James Franco dans l’écriture du film ne passe inaperçue. L’acteur et réalisateur avait été accusé d’agression sexuelle en 2018 sur plusieurs femmes.
Le tournage du film The Policeman étant désormais terminé, les deux femmes affirment avoir porté plainte «pour parler de leurs expériences avec Gallo parce qu’elles s’inquiétaient pour les autres femmes travaillant avec lui à l’avenir». Les actrices regrettent également qu’aucun membre de la production, ni même le réalisateur qui était présent, ne soit venu prendre leur défense lors du casting. La SAG affirme avoir «étroitement collaboré avec la production concernant les plaintes et, même si le tournage est terminé, nous continuons à surveiller et à enquêter».