«Comme tous les gens connaissent la fin, il faut trouver une autre façon de la raconter»: près de 30 ans après sa sortie, le film culte La Haine est transposé par son réalisateur Mathieu Kassovitz en spectacle musical prévu pour l’automne 2024. Les Vinz, Saïd et Hubert de 1995 interprétés par Vincent Cassel, Saïd Taghmaouï et Hubert Koundé seront incarnés par des acteurs-danseurs-chanteurs à partir du 10 octobre 2024 à La Seine Musicale, en région parisienne.
Ces figures de banlieusards cabochards qui finissent par se heurter à la violence policière prendront de nouveaux traits après un casting qui a vu défiler «environ 3.000 personnes» pour ces trois rôles principaux, comme l’explique Mathieu Kassovitz à l’AFP. Le metteur en scène et ses équipes préparent cette transposition scénique depuis «deux ans». Le projet était déjà bien lancé au moment de la mort de Nahel, 17 ans, tué fin juin par un policier lors d’un contrôle routier à Nanterre.
«La mort de Nahel est différente (de ce qui se passe dans le film, ndlr), elle a été filmée. Mais ça fait 30 ans qu’on m’appelle tous les mois pour commenter une bavure, ce n’est pas quelque chose de nouveau», déroule celui qui est aussi acteur. «Ces images rappellent à tout le monde que ça n’a jamais arrêté, c’est pour ça qu’on a cette affiche». On y lit «La haine, jusqu’ici rien n’a changé».
«Même si ça s’appelle “La Haine”, c’est plutôt “bon feeling”, comme dans le film, à part les dix dernières secondes (fin tragique, ndlr). Il y a de l’émotion, du rire, du rythme, on prend les gens par le col, on les emmène dans un voyage» explique le cinéaste de 56 ans. «Comme tous les gens connaissent la fin, il faut trouver une autre façon de la raconter, mais on a pour ça une distance de 30 ans, c’est une vision plus large que celle que le film a pu donner».
La billetterie pour le show s’ouvre vendredi à 10h00. «Le planning est de plus en plus serré mais on est pas mal», commente «Kasso», qui se remet d’un accident de moto en septembre. «Je vais bien», glisse-t-il. Le spectacle de 90 minutes – peu ou prou comme le long métrage – doit mobiliser une trentaine de danseurs, chanteurs et comédiens. Il y aura une quinzaine de chansons originales créées pour l’occasion par une dizaine d’artistes. Le tout en quatorze tableaux.
«Pour les gens de la com’, il ne faut pas dire que c’est une comédie musicale, car ça fait un peu ringard, mais c’est une comédie musicale dans le sens où ça raconte une histoire en musiques et chansons, inspirée d’un film qui ne l’était pas».
La Seine Musicale fut récemment le lieu du retour au premier plan de l’opéra-rock Starmania. Mais les comparaisons s’arrêtent là à entendre le maître-d’oeuvre. «C’est plus moderne qu’une comédie musicale de base avec des chanteurs qui arrivent, qui déclament: le hip-hop permet une approche plus naturelle, c’est logique qu’il y ait un échange en musique, alors que dans “Les parapluies de Cherbourg”, il n’y a aucune explication quand des gens chantent au milieu des scènes».
Le metteur en scène promet «une interaction avec des écrans, des écrans qui sont des décors, des décors qui bougent, un mélange de technologie et de live». «C’est un mélange jamais vu entre le cinéma et le live, on n’a pas de référence dans l’équipe quand on en parle entre nous: on essaye de mettre le spectateur à la place de la caméra, que ce soit immersif».