Le long métrage One Piece – Red, istanbul depolama, sorti mercredi 10 août dans les salles obscures, est dérivé du manga le plus vendu au monde. Goro Taniguchi, réalisateur de série d’animation a donc eu la lourde tâche d’adapter au cinéma, le monde de pirates déjantés, créé il y a 25 ans par Eiichiro Oda. Dans le film, l’espiègle capitaine Luffy et son équipage arrivent sur l’île d’Elegia qui s’apprête à accueillir le premier concert de la superstar Uta. Chansons à gogo (interprétées par Hoshi dans la version française), combats impressionnants et tourbillon visuel cohabitent pendant quasiment deux heures.
Pour les spécialistes de l’animé, tous les ingrédients sont réunis pour passer un bon moment. Alexandre S. de Gamergen, décrit le film comme «un savant dosage, qui sait nous régaler sans trop en faire» avec une «mise en scène grandiose». «Nous en sommes ressortis des étoiles plein les yeux, des musiques plein la tête et une certaine euphorie pas loin d’égaler la découverte du fameux moment « Il riait »», déclare-t-il, ajoutant qu’il s’en est pris «plein la vue». En effet, pour Simon Cherner du Figaro , «l’histoire assume sans détour sa fonction de pure gourmandise pour connaisseurs et autres aficionados de son univers fantastique et bigarré».
Les critiques du Parisien, Catherine Balle et Michel Valentin ajoutent que «les fans, eux, devraient apprécier cette œuvre pleine de rebondissements et de bastons, ponctuée de jolies chansons et de révélations sur le personnage de Shanks le Roux.» Un avis partagé par Pierre Siclier de Cinésérie qui reconnaît que le film «offre un grand spectacle pour les fans de One Piece et les adeptes d’animation en général.» Il s’est donc régalé «devant un long combat où chacun des nombreux personnages aura son mot à dire», même si ce «tourbillon visuel frôle l’épuisement».
«Réunissant tous les ingrédients qui ont fait le sel de la saga, le film réussit l’exploit – non sans quelques faux pas visuels – de s’adresser aux aficionados comme aux non-initiés», estime Simon Hoarau dans Les Fiches du Cinéma. Cependant, Marie Sauvion, dans les colonnes de Télérama, ne partage pas cet avis: «le film de Goro Taniguchi ne s’adresse malheureusement qu’à un public d’aficionados, conquis d’avance», regrette-t-elle.
Point de vue partagé par le Journal du Dimanche , où on a eu, semble-t-il, des difficultés de compréhension. «Il faut sans doute avoir mis un jour le nez dans quelques-uns des 101 tomes de l’odyssée ou être parent d’ados accros aux exploits du capitaine au chapeau de paille pour apprécier sur grand écran cet univers foisonnant et déjanté, explique Barbara Théate. Difficile en effet de comprendre qui est qui et qui veut quoi dans la pléthore de personnages qui s’aiment, s’affrontent et se trahissent. À partir de là, c’est une explosion de combats, de chansons et de rebondissements qui s’enchaînent. Ça crie, ça grimace, ça joue des muscles dans un maelström visuel aux couleurs criardes qui n’est pas toujours beau à regarder et dans lequel on se noie si on n’a pas les codes.»
Pour Pierre Siclier de Cinésérie, aussi, cette multitude de personnages n’a pas été appréciée. «On peut tout de même regretter qu’en cumulant tous ces protagonistes (véritable fan service), très peu ont un véritable impact sur un ensemble qui a malheureusement tendance à trop s’étirer. En cela, One Piece Film – Red n’est pas un grand film», regrette-t-il. Second point décevant, Alexandre S. de Gamergen reconnaît que certains plans ne sont pas très soignés. Un manque de détails, également pointé du doigt dans les colonnes du Journal du Dimanche, où Barbara Théate «s’étonne que les détails des visages ne soient pas dessinés dans les scènes de foule».
En plus de l’univers coloré parfois un peu kawaï, il faut, pour apprécier totalement l’animé, aimer les comédies musicales car les chansons s’enchaînent dès les premières minutes. «Animation d’excellente facture, chansons à gogo (que des tubes en puissance)», affirme Amandine Schmitt pour L’Obs. Plaisir partagé par Pierre Siclier, «plusieurs chansons s’enchaînent au début du film, accompagnées d’un visuel impressionnant. Coloré et ultra rythmé durant ces séquences, le film ne laisse ainsi que peu de répit», décrit-il. Il ne faut rien manquer «de la virtuosité du graphisme», ajoute Clarisse Fabre, critique au Monde, mais surtout être prêts «à endurer les longues chansonnettes pop sucrées d’Uta», complète-t-elle.
Autre «petit bémol» soulevé par Alexandre S. pour Gamergen, les changements de voix entre la parole et le chant, assez troublants entre Kaori Nazuka et Ado – actrice et chanteuse – dans la version originale qui pourrait également se constater pour les voix françaises. L’animé musical «bascule vers le mélo» sans réelle profondeur selon Clarisse Fabre du Monde. «Uta est-elle devenue une fille ingrate? Son père s’est-il montré à la hauteur? Bien-pensant, le film ne charge pas trop la barque de ses personnages», évoque-t-elle déçue. En conclusion, comme l’exprime Marie Sauvion, «One Piece Film – Red se révèle un peu raide, dans le genre trip involontaire de LSD dont on ne saurait dire s’il était parfaitement laid ou horriblement beau.»