Théâtre d’une rafle de juifs en octobre 1943, Rome aura finalement son musée de la Shoah, auquel le gouvernement d’extrême droite de Giorgia Meloni a donné son feu vert jeudi soir. L’Italie, à travers «l’institution d’un musée national de la Shoah à Rome», veut «concourir à maintenir vivante et présente la mémoire de la Shoah», a expliqué le gouvernement dans un communiqué publié à l’issue du dernier conseil des ministres. L’annonce intervient une semaine après la visite à Rome du Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou.

Le ministre italien de la Culture, Gennaro Sangiuliano, a annoncé à l’issue du Conseil des ministres le déblocage de dix millions d’euros «pour commencer à réaliser dans notre capitale» un musée de la Shoah, déjà «présent dans toutes les grandes capitales d’Europe» mais qui a mis un quart de siècle à se concrétiser en Italie. Fort symboliquement, le musée sera construit sur un terrain jouxtant le parc de la Villa Torlonia, qui fut la résidence du dictateur fasciste Benito Mussolini, au pouvoir de 1922 à 1943.

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Cette annonce a été saluée par la communauté juive de Rome, sa présidente Ruth Dureghello appelant cependant dans un communiqué à «des choix réalisables dans des délais brefs pour garantir à la capitale d’Italie un musée comme toutes les grandes capitales européennes». Le musée de la Shoah devra «être un instrument d’éducation à la démocratie, au pluralisme (…) parce que malheureusement nous voyons que des choses que nous considérions comme acquises et comme des conquêtes définitives ne le sont pas», a expliqué vendredi à l’AFP l’architecte en charge du projet, Luca Zevi, en précisant que le musée devrait voir le jour «dans trois ans» au maximum.

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L’entreprise d’extermination des juifs d’Europe menée par l’Allemagne hitlérienne, qui fit au moins six millions de victimes, toucha aussi Rome, où se trouvait l’une des communautés juives les plus anciennes d’Europe. Le 16 octobre 1943, les troupes allemandes soutenues par des fonctionnaires du régime fasciste procédèrent à une rafle dans l’antique ghetto de Rome. 1023 juifs furent déportés au camp d’extermination d’Auschwitz. Giorgia Meloni a commémoré l’an passé cette «journée tragique» en rendant hommage aux victimes de «la fureur nazi-fasciste» . Président du Sénat et co-fondateur controversé de Fratelli d’Italia, Ignazio La Russa, a, lui aussi, évoqué «une des pages les plus sombres de notre histoire» et exprimé pour l’occasion «son plus sincère soutien» à la communauté juive.

La persécution des juifs en Italie n’avait pas attendu l’action directe des troupes nazies. Sous son régime, Mussolini avait fait adopter en 1938 une batterie de «lois raciales». Cette législation antisémite instituait toute une série de discriminations à l’égard des juifs : interdiction d’accès aux emplois de la fonction publique, exclusion des enfants juifs des écoles publiques, interdiction de se marier avec des Italiens.