Un cri du cœur pour «le dernier monstre sacré du cinéma». Dans une tribune, publiée par Le Figaro, cinquante-six artistes et personnalités de la culture prennent la défense de Gérard Depardieu, mis en examen pour viols depuis 2020 et au cœur d’un scandale à la suite d’un reportage de Complément d’enquête qui le montre sexualisant une enfant. «Lorsqu’on s’en prend ainsi à Gérard Depardieu, c’est l’art que l’on attaque», affirment les signataires du texte.
Un texte dont Gérard Depardieu s’est dit «très heureux», comme il l’a expliqué mardi à RTL. L’acteur a raconté au téléphone qu’il trouvait la tribune «très bien écrite», par Yannis Ezziadi, un comédien proche de l’une de ses filles, comme le rapporte le journaliste de RTL Vincent Serrano. «On m’a présenté cette lettre, j’ai trouvé qu’elle était belle et j’ai donc dit à son auteur qu’elle pouvait être publiée», a-t-il ajouté selon RTL, en précisant qu’il n’avait appelé personne ni demandé l’aide d’aucun artiste. «Plusieurs ont refusé», ajoute-t-il cependant en saluant «le courage des signataires».
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Au lendemain de la publication, Jack Lang a témoigné de son amitié et de son admiration pour son talent. «J’approuve cette tribune», a même expliqué l’ancien ministre de la Culture à France Info, en précisant qu’il n’aurait pas pu signer la tribune car elle ne contient «rien sur les droits des femmes et les insultes à l’égard des femmes» : «on doit ne pas oublier d’abord le combat que mènent les femmes pour leurs droits, contre le patriarcat, contre l’arbitraire masculin», dit-il.
La publication de cette tribune a cependant suscité l’incompréhension voir la colère de plusieurs militants de la cause féministe. «C’est une tribune très pédagogique, juge la présidente de la Fondation des femmes, Anne-Cécile Mailfert, interrogée par l’AFP. Ce que l’on voit, c’est comment un entourage va s’organiser et utiliser des arguments tels que “c’est un monstre sacré, c’est un génie” pour protéger quelqu’un». «Ça va être très difficile pour les victimes de parler et porter plainte (…). Mais personne n’est au-dessus des lois», a ajouté la fondatrice d’Osons le féminisme.
Pour l’élue au conseil de Paris Raphaëlle Rémy-Leleu, cette tribune «défend la culture du viol» et a décidé de «privilégier l’artiste, et de mépriser la parole de chaque victime». Dans un entretien accordé à France Info, elle estime que ces 56 signataires «font face à un déni de réalité». «Ils nous disent : “On refuse de voir ce qu’a fait l’homme (…) parce qu’il est l’artiste”. Et ça, c’est particulièrement grave.» «Cette tribune assume de faire diversion». Raphaëlle Rémy-Leleu aurait préféré «retrouver ces personnalités, ces artistes, ces voix publiques dans tellement d’autres combats, dans tellement d’autres tribunes, notamment pour défendre les victimes de violences sexistes et sexuelles, pour lutter contre le sexisme en général».
Emmanuelle Dancourt, présidente de Metoo Media, a également exprimé son écœurement sur BFMTV : «Ça m’attriste, je suis atterrée parce que j’ai l’impression qu’il y a une incompréhension : quand j’entends parler de torrent de haine qui se déverse sur Gérard Depardieu, ce n’est pas du tout ça».
Parmi les signataires – 32 hommes et 24 femmes- on compte des acteurs, des écrivains, des chanteurs, des musiciens, un académicien… Si certaines personnalités ne font pas partie du cercle privé de Gérard Depardieu, d’autres noms comme celui de l’actrice Carole Bouquet, son ancienne compagne, de l’actrice Nathalie Baye ou du metteur en scène Michel Fau, figurent parmi ses soutiens de la première heure.
Un nom, dans la liste, a retenu l’attention de Laurent Boyet, président de l’association Les Papillons : celui l’acteur Pierre Richard, ambassadeur de l’association qui lutte contre les maltraitances faites aux enfants. Sur les réseaux sociaux, Laurent Boyet, a déclaré que l’association se séparait dorénavant de ses services. «Bien sûr, nous connaissions son amitié passée avec Gérard Depardieu, née des films qu’ils ont tournés ensemble et d’une certaine conception du bien vivre. Mais il y a des actes et des propos qu’on ne peut accepter ou excuser, même au nom d’une quelconque amitié», a justifié le président de l’association.