Les organisateurs du 60e Salon international de l’agriculture, qui démarre le 24 février, ont appelé mardi les responsables politiques à ne pas se livrer à une «récupération facile du malaise agricole » et les visiteurs à modérer leur consommation d’alcool. Après une démonstration de force du monde agricole, expression d’une profonde colère sur les conditions d’exercice du métier, et en dépit d’appels isolés au boycott, le Salon de l’agriculture investira comme à l’accoutumée le parc des expositions parisien de la Porte de Versailles pendant dix jours (24 février-3 mars).

L’événement, qui attend 600.000 visiteurs, a été cité par les syndicats majoritaires FNSEA et Jeunes agriculteurs comme date butoir dans leur bras de fer avec le gouvernement. Ils attendent, avant son ouverture, la concrétisation de premiers engagements consentis dans l’urgence de la crise, pour obtenir la levée des barrages d’agriculteurs.

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«Je ne crains pas un salon un peu chaud, je crois à un salon studieux», a déclaré son président, Jean-Luc Poulain, lors d’une conférence de presse. «Les agriculteurs ont montré lors des dernières actions syndicales qu’ils savaient être responsables. C’est aussi l’une des clés du succès du mouvement vis-à-vis de l’opinion publique», a-t-il ajouté.

Certes, ce sera un «moment politique», avec notamment la traditionnelle visite du président de la République, mais le salon devra demeurer un «moment de convivialité» et «de fierté», a souligné la semaine dernière le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau. «C’est un moment de fierté pour les agriculteurs de pouvoir accueillir tous les Parisiens et les gens qui viennent voir avec leurs enfants, leur famille», a-t-il déclaré.

Le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau, a de son côté estimé mardi, lors de la conférence de presse, que ce salon sera le «moment (…) d’un lien de confiance retrouvé» avec les agriculteurs. Jean-Luc Poulain espère que les responsables politiques, qui viennent généralement en nombre au salon, surtout à l’approche d’une échéance comme les élections européennes en juin, ne soient pas dans «la récupération facile du malaise agricole, mais porteurs d’échanges et de solutions au-delà de leurs propres intérêts politiques».

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«Nous, dans le monde agricole, on n’est pas dupes. On sait bien pourquoi certains ou certaines viennent sur les barrages, ou viennent dans les exploitations», a-t-il poursuivi. La crise agricole qui a éclaté en janvier a notamment vu le Rassemblement national s’afficher comme le «porte-voix des campagnes» et dénoncer «l’Europe de Macron» qui veut «la mort de notre agriculture».

Avant d’être un rendez-vous politique, le salon est un événement populaire, où citadins et ruraux se retrouvent autour d’une vache égérie – la Normande Oreillette cette année -, de pâté et de fûts de bière. Au point de prendre parfois des allures de feria. L’an dernier, les organisateurs ont dû appeler à préserver cette «grande fête populaire» des excès de l’alcool. Ils ont aussi fermé de façon anticipée, le dernier samedi, pour des raisons de sécurité face à l’afflux de visiteurs.

Les organisateurs ont prévu d’inciter les visiteurs «à venir en semaine» plutôt que le week-end et vont «passer un cap» dans la prévention de l’ébriété excessive pour conserver un salon «tranquille et convivial», a expliqué Valérie Le Roy, la directrice de l’événement. «On se réserve le droit de fermer le stand» d’un exposant qui continuerait à servir des visiteurs manifestement ivres malgré les avertissements, a-t-elle décrit.

Le Salon de l’agriculture a lieu tous les ans à Paris depuis 1964, sauf en 2021, édition annulée en raison de l’épidémie de Covid-19. L’événement est la propriété du Centre national des expositions et concours agricoles (Ceneca), constitué des grandes organisations agricoles, en particulier le fonds d’investissement Unigrains, fondé par les céréaliers français, la FNSEA ou encore son association de betteraviers CGB.

Pour succéder à Jean-Luc Poulain, dont c’est le 15e et dernier salon, le seul candidat déclaré est Jérôme Despey, le «M. Vin» de la FNSEA, premier vice-président du syndicat majoritaire. Ce dernier a expliqué à l’AFP que s’il est élu, ce ne sera «pas au nom de la FNSEA» mais pour «représenter l’ensemble des composantes de l’agriculture». Il gardera toutefois en parallèle ses fonctions au sein du syndicat majoritaire.