Les pensions complémentaires des ex-salariés du privé seront revalorisées de 4,9% à compter du 1er novembre, au niveau de l’inflation, ont annoncé les organisations syndicales et patronales gestionnaires du régime Agirc-Arrco, qui doivent encore signer l’accord décroché dans la nuit du jeudi 5 octobre.

Le «malus», décote temporaire de 10% qui s’appliquait depuis 2019 sur les pensions de nombreux retraités pourtant partis en ayant réuni toutes les conditions légales, sera supprimé dès le 1er décembre pour les nouveaux retraités, puis à partir d’avril pour l’ensemble des retraités concernés, ont-ils indiqué. Sans définitivement promettre de signer, plusieurs organisations dont la CFDT et le Medef ont jugé l’accord «équilibré». La date butoir pour signer l’accord a été fixée à mercredi.

Entre 2024 et 2026, la revalorisation des pensions pourrait être moindre: en fonction de la conjoncture économique, la hausse pourrait être sous-indexée de maximum 0,4 point en dessous de l’inflation. Mais le conseil d’administration de l’organisme paritaire pourra choisir de la ramener au niveau de l’inflation.

Le «malus», instauré en 2019, visait à inciter les salariés à travailler un an de plus, alors même qu’ils avaient atteint toutes les conditions légales pour partir. À défaut, ils voyaient leur pension amputée de 10% pendant trois ans. Un bonus était accordé pour deux à quatre ans de travail supplémentaire. Il sera conservé pour ceux qui ne sont pas touchés par la réforme.

Outre ce projet d’accord, syndicats et patronat ont aussi montré un front commun face aux velléités de l’exécutif de ponctionner les réserves de l’Agirc-Arrco, ce que le négociateur de FO Michel Beaugas estime être un «détournement de fonds». L’exécutif réclame un à trois milliards annuels à l’Agirc-Arrco d’ici 2030, qu’il a d’abord présentés comme une participation au relèvement du minimum contributif (petites pensions) prévu par sa réforme des retraites, pour finalement évoquer un devoir de «solidarité» entre régimes en vue d’un «retour à l’équilibre» global. Il menace sinon de se servir dans les caisses. Il argue de la bonne santé financière du régime, ses 68 milliards de réserves, et des nouvelles recettes apportées par la réforme des retraites (estimées par l’Agirc-Arrco à 22 milliards sur quinze ans).

D’après les syndicats, une telle ponction mettrait en péril l’Agirc-Arrco, et ses capacités à augmenter les pensions à l’avenir. Selon une source proche du dossier, un milliard équivaut à 1,1% de revalorisation. Le régime fonctionne aussi avec une «règle d’or» qui impose de conserver six mois de versements d’avance en réserve, sur un horizon de 15 ans. «On résiste tous. On refuse de signer un chèque au gouvernement», a résumé Christelle Thieffinne (CFE-CGC).

Les partenaires sociaux ont choisi de ne prévoir dans leur accord aucun «tuyau financier vers l’État». Mais un article prévoit le lancement de travaux visant à des mesures de «solidarité» internes au régime, via un groupe de travail, en vue d’un nouvel accord d’ici la fin du premier semestre 2024. La CPME a regretté auprès de la presse que cet article ne fasse pas directement référence aux petites pensions. Les partenaires sociaux cherchaient la parade «pour que ça n’aille qu’à ceux qui ont moins de 85% du Smic et dépendent de l’Agirc Arrco», pas du régime général, a expliqué Pascale Coton (CFTC).

«Malgré les pressions de l’exécutif au cours de cette négociation, les partenaires sociaux ont avancé ensemble», s’est réjouie la négociatrice du Medef Diane Milleron-Deperrois. «On a un équilibre entre la préservation du pouvoir d’achat des retraités et la pérennité financière du régime dans la durée», négocié «indépendamment». «Si le gouvernement s’obstinait il devra en porter la responsabilité», a-t-elle dit.

L’Agirc-Arrco verse chaque année près de 90 milliards d’euros à 13 millions de retraités. Cette part complémentaire représente entre 20% de la pension totale pour les salariés précaires et 60% pour certains cadres.