Un affichage obligatoire qui doit devenir la norme. Face au peu de succès du label «fait maison» qui existe depuis 2014 mais est facultatif et encore trop peu utilisé, le gouvernement entend aller encore plus loin et souhaite le renforcer. Une position défendue par Olivia Grégoire, la ministre déléguée chargée du Commerce et de l’Artisanat, qui a expliqué ce week-end dans La Tribune dimanche que le «fait maison» serait garanti comme tel dans les 175.000 restaurants du pays, et ce, d’ici à 2025. «Nous devions agir», s’est ainsi exprimée la ministre dans l’hebdomadaire, expliquant que «la mention “fait maison”», aujourd’hui «facultative sur les cartes», restait «compliquée» et «de ce fait, peu utilisée». Mais, alors que «quelques semaines de concertation sont encore prévues avant l’ouverture d’un débat parlementaire» à ce sujet, plusieurs questions se posent d’ores et déjà. Qu’est-ce qu’un plat «fait maison» ? Qui a le droit d’utiliser cette mention ? Quels sont les critères à respecter pour pouvoir l’utiliser ?

Aujourd’hui, un certain nombre de règles sont déjà édictées. La première étant que tous les types de restauration – peu importe qu’ils s’agissent d’un restaurant traditionnel, d’une chaîne, de fast-foods, de cuisine à emporter ou de restauration collective – peuvent afficher la mention «fait maison» s’ils remplissent les critères. Parmi ces critères, il faut notamment que les plats soient «confectionnés sur place», c’est-à-dire dans les locaux où sont servis les clients. Seule exception pour les traiteurs et les marchands ambulants (food truck, stand sur un marché…) qui peuvent afficher le logo «fait maison», même si leurs plats sont fabriqués en dehors du lieu où ils les vendent. Autre critère à respecter : celui de cuisiner «à base de produits frais ou crus». Et si ces différents aliments sont mis dans un emballage, conditionnés ou conservés, «ils doivent l’être crus et sans autre aliment hormis le sel», souligne le ministère. Rien ne s’oppose non plus à la congélation ou à la surgélation, «dès lors que ces méthodes de conservation ne remettent pas en cause le caractère cru du produit».

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Interrogé ce lundi matin sur France 2 à ce sujet, Thierry Marx, le président de l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (Umih), a justement rappelé que «la concurrence» et «l’ubérisation» du secteur de la restauration nécessitaient aujourd’hui de remettre «davantage de transparence sur les cartes des restaurants». Le chef doublement étoilé, qui plaide depuis plusieurs mois pour un renforcement du label, estime en effet qu’il faut aujourd’hui «réaccélérer un peu les choses» pour que «ceux qui font bien soient récompensés face à ceux qui, parfois, trichent un peu». «La gastronomie française est un repère et, dans un contexte où les Jeux Olympiques vont arriver, on doit rassurer nos amis touristes sur la transparence de nos appellations». Lui évoque le chiffre de «54% de restaurants qui font du “fait maison” et qui souffrent d’être comparés en termes de prix à d’autres qui, eux, n’en font pas».

Parmi les 50% restants, certains restaurateurs utilisent des «produits sourcés, ou transformés parfois sur place à 80%», mais «évidemment, ce n’est pas du tout du “fait maison” comme on pourrait s’y attendre dans un restaurant», souligne Thierry Marx. Pour autant, lui défend également le «pas “fait maison”» dans la mesure où un restaurateur peut tout à fait, selon lui, «acheter une pâte feuilletée chez le boulanger d’à-côté» ou «un pâté chez le charcutier du coin de très bonne facture» mais «on peut le dire, car on n’a rien à cacher». «Et je crois que c’est cette transparence dont nous avons besoin absolument, pour montrer que la gastronomie française ne triche pas», conclut-il, avant de rappeler que le «fait maison» est exigeant et parfois «compliqué», notamment en raison «du sourcing», «du prix des matières premières» et «du nombre de collaborateurs nécessaires pour faire du “fait maison”».

En attendant d’en savoir davantage sur le renforcement du label, un premier calendrier de travail a déjà été donné par la ministre. Jusqu’aux JO, il s’agit de renforcer la communication autour du label existant, afin que le grand public tout comme les restaurateurs le connaissent mieux. Après les JO, le but étant de publier un décret qui viendra donc renforcer le label «fait maison» actuel pour identifier des produits non transformés sur place. Mais des questions subsistent, notamment de la part de l’Umih, qui s’interroge sur l’intérêt de distinguer les plats des produits «faits maison». De même, l’organisme demande à «ne pas prendre en compte les produits surgelés» qu’il considère comme étant «un mode de conservation» ou encore de «ne pas pénaliser les produits ou plats transformés par quelqu’un d’autre». À l’exemple des pâtisseries qui «pourraient être réalisées par un chef à l’extérieur du restaurant mais avec autant de respect du “fait maison”».

Il faudra néanmoins attendre quelques mois avant d’en savoir plus puisque, selon le cabinet d’Olivia Grégoire, la mesure «entrera en vigueur d’ici 2025» à l’issue d’une consultation «de trois à quatre mois». La publication d’un arrêté gouvernemental sera ensuite nécessaire pour obliger l’ensemble de la profession à mentionner les plats non faits-maison. «Il existe aujourd’hui une iniquité entre les restaurateurs qui jouent le jeu en achetant et travaillant des produits frais et ceux qui se procurent tout chez des grossistes. Surtout en période d’inflation où le frais et le brut sont beaucoup plus chers que le transformé», explique l’entourage de la ministre. De son côté, Thierry Marx a demandé à ce que ce soit «vraiment mis en place pour les JO parce que ça nous paraît être une mise en lumière extrêmement importante pour les restaurateurs».