Après l’Europe, l’OCDE. Agnès Pannier Runacher, la ministre de la transition énergétique continue de battre le rappel des pays ayant choisi de relancer la construction de centrales électriques nucléaires. Ces 28 et 29 septembre, l’OCDE réunissait, sous la présidence de la France, vingt ministres et une trentaine de grands dirigeants d’entreprises, tous acteurs du nucléaire. «Nous voulons dégager un consensus mondial, comme l’ont fait les travaux du Giec, sur le nucléaire. C’est un atout majeur pour la sécurité énergétique et répondre aux enjeux climatiques», appelle la ministre française.
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«Il faut sortir de ces deux jours de réunion en ayant une idée de ce que sera la prochaine étape», tance William Magwood IV, directeur général de l’agence de l’énergie nucléaire (NEA), insistant sur l’urgence à redévelopper cette technologie. «Pour atteindre la neutralité carbone en 2050 il faut tripler la production d’électricité nucléaire», ajoute le patron de la NEA. «Le nucléaire est une énergie décarbonée et abondante, renchérit le commissaire européen aux affaires intérieures Thierry Breton. L’objectif est de disposer de 150 GW de capacités nucléaires installées en Europe d’ici 2050». Tous s’accordent en outre à dire qu’il faut profiter d’un alignement des planètes en faveur du nucléaire. Le basculement des mentalités en sa faveur a eu lieu dans de nombreux pays. Des décisions politiques ont été prises. Ils ne manquent que les financements publics pour parfaire le tableau.
«Nous allons avoir besoin des énergies renouvelables et du nucléaire. Aujourd’hui, 25% de l’électricité européenne est nucléaire. Personne ne peut se passer d’une énergie qui ne dépend pas de la météo», tranche Agnès Pannier Runacher, se livrant à un numéro d’équilibriste. D’un côté elle n’a de cesse de louer la complémentarité entre les énergies renouvelables et le nucléaire. De l’autre, elle fustige la politique des pays – notamment l’Allemagne, sans jamais la nommer – qui refusent le nucléaire tout en bénéficiant des exportations d’électricité française pour pallier l’intermittence des énergies solaire ou éolienne, ou pire, qui relancent leurs centrales à gaz et à charbon.
Pour Agnès Pannier Runacher, l’enjeu politique est clair. Il faut que le nucléaire bénéficie du même environnement financier, fiscal et réglementaire que les énergies renouvelables, restant fidèle à sa doctrine de «neutralité technologique» pour les énergies bas carbone. Les entités internationales, l’Europe, les banques de financement sont ainsi appelées à financer à leur tour les programmes nucléaires pour aider à leur développement et participer à la recherche et à l’innovation dans ce domaine.
«Nous n’avons pas attendu cette conférence pour mettre en place le modèle de financement du nouveau nucléaire», ajoute la ministre, citant l’exemple britannique. «Hinkley Point a été financé avec des contrats pour différence (CFD) et pour le second réacteur, avec des actifs de base et des CFD. Le sujet du financement du nouveau nucléaire n’en est pas un. C’est à peine 3 milliards par an sur les 20 milliards qu’EDF doit débourser pour son parc. Enedis prévoit d’investir 96 milliards dans son réseau pour accompagner le développement des énergies renouvelables».
Le défi est plus humain que financier alors que la plupart des grands pays ont mis sous cloche leurs programmes nucléaires pendant trois ou quatre décennies. Tout est à reconstruire, les compétences, la filière industrielle, les sous-traitants, les formations… La France estime que le nucléaire devra embaucher 100.000 personnes au cours de la décennie, mais elle sera en concurrence avec d’autres pays dans la course à l’acquisition de talents. compte à rebours est lancé.