C’est une petite nouveauté aux grandes conséquences. Le tout premier bateau-mouche électrique va voguer sur la Seine, sous l’étendard Vedettes de Paris. «Fruit de l’innovation et de l’expertise française, ce premier bateau rétrofité 100% électrique, qui représente une première mondiale, ouvre la voie pour un voyage plus responsable et désirable», se félicite le groupe aux 800.000 voyageurs par an, qui vient de réceptionner le premier de ses navires de croisière, après que le moteur thermique de celui-ci a été remplacé par un moteur électrique.
Une aventure lancée en 2021, au lendemain de la crise sanitaire du Covid-19, alors que la directrice générale de Vedettes de Paris, Marie Bozzoni, participe à la Convention des entreprises pour le climat (CEC). «Je me suis retrouvée là par hasard, et j’ai pris une grosse claque. Parce que je pensais que mon activité était à l’abri de toutes ces considérations-là, qu’au lieu de 31 degrés à Paris, il en ferait 33 ou encore que les crues n’arrivent qu’à la basse saison, loin de notre pic d’activité», raconte celle qui s’est alors interrogée : «quelle est la valeur d’un fleuve en bonne santé ?».
Face à ce constat, sa «première réaction» a été de choisir de «rétrofiter» sa flotte de bateaux, dont certains fonctionnaient déjà au diesel électrique. «Cela n’avait jamais été fait, on savait que c’était en principe réalisable, mais on ignorait tout des modalités techniques», explique celle qui rappelle que la combustion de ses navires de croisière représente «50% de son bilan carbone». Pour Vedettes de Paris, deux enjeux : celui d’économiser sur l’impact carbone des bateaux, et celui d’économiser, à terme, sur la facture de gasoil. «D’un autre côté, il fallait immobiliser les bateaux le temps de leur transformation», reconnaît la directrice du groupe.
C’est la raison pour laquelle elle a décidé de procéder à ce changement par étapes. En automne 2021, les études poussées débutent, avec l’objectif de prendre en compte l’important poids des batteries, tout en améliorant l’hydrodynamisme de la coque. Après six mois d’études, un appel d’offres est lancé pour une mise en chantier en novembre 2022. Remporté par Actemium, filiale de Vinci Energies, il permet de lancer un projet 100% français. Au total, pas moins de douze mois de travaux auront été nécessaires pour transformer le pack énergie batteries et moteur, ainsi que la coque et les appareils à gouverner.
Les prochains sur la liste ? Deux autres bateaux – sur une flotte de cinq – sont déjà mis en chantier depuis novembre 2023, et devraient être prêts pour la haute saison, en avril et mai. Un quatrième devrait être transformé durant l’hiver 2024/2025. Quant au cinquième et dernier, pas sûr qu’il fasse partie du même projet. «On commence à réfléchir à s’ouvrir à d’autres technologies, pourquoi pas l’hydrogène ?», lance fièrement Marie Bozzoni, qui, sans mauvais jeu de mots, déborde d’énergie pour imaginer les Vedettes de Paris de demain.
Un choix stratégique à l’aune de l’organisation des Jeux olympiques cet été à Paris ? «Pas du tout» répond l’intéressée, pour qui la décision était prise bien avant que l’événement ne devienne une réalité, mais dont les bateaux ont bien été réquisitionnés pour transporter les athlètes durant la cérémonie d’ouverture. Pour autant, son groupe affiche bien l’ambition «de disposer majoritairement d’une flotte 100% électrique en marge des Jeux olympiques de Paris 2024 et de révolutionner le tourisme en plaçant la durabilité comme valeur socle de sa mission». «Au-delà du fait que nos bateaux sont électriques, je pense que les gens viendront surtout parce que l’expérience à bord est totalement transformée (…) Il n’y a pas de bruit, pas d’odeur, et aucune vibration, les visiteurs sortent beaucoup plus apaisés qu’avant. C’est vraiment une expérience complètement différente et assez unique, encore mieux qu’un bateau à voile», s’emballe Marie Bozzoni.
Une invitation alléchante sur le papier, mais attention, ceux qui voudront uniquement embarquer à bord de ce modèle électrique devront être patients avant que la flotte entière ne soit convertie. Pour l’instant, il n’est en effet pas possible de savoir à l’avance si l’on peut embarquer sur l’unique modèle électrique. Pour être certain d’embarquer sur celui-là et pas un autre, la DG du groupe «conseille de téléphoner à l’avance». En espérant que l’horaire de départ du bateau coïncide avec l’emploi du temps de la personne intéressée.