«La route de la “fast-fashion ” dans le secteur automobile est ouverte.» C’est le cri d’alarme lancé par l’association «Halte à l’obsolescence programmée» (HOP) dans un rapport sur l’obsolescence dans l’automobile, publié ce mercredi, qui alerte sur le risque «de voir advenir des “voitures jetables”».

D’une part, l’association créée en 2015 pointe «l’obsolescence réglementaire de voitures thermiques encore fonctionnelles», provoquée par des politiques publiques comme les zones à faible émission (ZFE), la fin prévue de la circulation des véhicules thermiques en 2050 ou encore le bonus-malus écologique. Dans le cas des ZFE, cette politique «représente un risque d’exclusion de certaines populations, et suppose un changement de motorisation pour nombre d’habitants et de travailleurs en ZFE», note l’association, qui appelle à «s’intéresser à la fin de vie de ces véhicules, rendus réglementairement obsolètes».

Au-delà de l’aspect réglementaire, HOP s’interroge sur la durée de vie des véhicules actuels. Alors que le modèle économique actuel de l’achat et de l’entretien des automobiles est bien «huilé», gage d’une «longue vie en bonne santé» pour de nombreux véhicules, l’association dit «douter sur la capacité des véhicules thermiques modernes et des véhicules électriques à durer 19 ans, comme la moyenne actuelle, et plus». Au rayon électrique, HOP s’interroge sur la fiabilité à long terme des batteries et leur réparabilité. Certaines s’avèrent être assemblées d’une telle façon qu’elles ne sont pas démontables : d’où le risque de «batteries jetables» de facto alors que celles-ci représentent «entre 30 et 40% de la valeur du véhicule».

À lire aussiCes nouvelles usines qui reconditionnent les voitures

Autre tendance qui inquiète HOP : la production de nouveaux modèles en usine au moyen de très grandes pièces moulées au lieu d’un assemblage de dizaines de tôles. Une pratique appelée «giga-casting». Sources d’économies et de légèreté pour les constructeurs, ces pièces peuvent se transformer en cauchemar d’assureur et d’assuré : «Au moindre choc, il faudra remplacer une partie si importante de la voiture qu’il sera probablement plus rentable de la mettre à la casse en cas de choc», craint l’association, qui «dénonce les conséquences de cette pratique initiée par Tesla et BYD , progressivement reprise par d’autres constructeurs».

Enfin, HOP pointe les risques inhérents à l’électronisation croissante des voitures. L’association, qui a obtenu fin 2022 l’ouverture d’une enquête par le parquet de Paris contre Apple pour avoir rendu difficile la réparation de ses smartphones avec des pièces génériques, fait valoir que le même problème se pose dans les véhicules actuels dotés de puces électroniques refusant des «greffes» de pièces non montées en usine. HOP évoque aussi le risque d’obsolescence logicielle de véhicules très fortement numérisés.

Ainsi, face à ces limites, potentiellement coûteuses pour le consommateur et néfastes pour l’environnement, l’association appelle les pouvoirs publics à prendre des mesures fortes. «Si on ne fait rien maintenant, c’est l’avènement de la “fast-fashion” de véhicules jetables !», alerte Laetitia Vasseur, déléguée générale et co-fondatrice de HOP, citée dans un communiqué. HOP réclame ainsi l’instauration d’un «indice de réparabilité» des véhicules. Elle souhaiterait également la création de «normes de durabilité et réparabilité des batteries en Europe», voire une garantie décennale des accumulateurs, ainsi que la levée des obstacles à l’usage de pièces de réemploi. À moins de deux mois des élections européennes, HOP a par ailleurs lancé une pétition pour faire pression sur les candidats et les pousser à prendre des engagements à ce sujet.