Le ministre espagnol des Transports Óscar Puente, a sévèrement critiqué lundi la filiale à bas coûts de la SNCF Ouigo, l’accusant de vendre à perte pour accroître sa part de marché dans le transport de passagers aux dépens de la compagnie nationale espagnole Renfe. Dans une interview à la radio Onda Cero, M. Puente, un socialiste, a reproché à Ouigo de vendre des billets «très en dessous» de leurs coûts pour les trains à grande vitesse, parlant de pratiques «profondément déloyales». Le gouvernement de gauche de Pedro Sánchez, a-t-il dit, étudie la possibilité de dénoncer Ouigo devant la Commission nationale des Marchés et de la Concurrence (CNMC).
Tout en indiquant que la libéralisation du marché ferroviaire avait apporté «des choses positives», notamment en entraînant une baisse des prix, il a estimé qu’elle les avait «réduits à un niveau qui n’était pas tenable» pour les entreprises qui se disputent le marché, à savoir Renfe (qui dispose également d’une filiale à bas prix, Avlo), Ouigo et Iryo, filiale de la compagnie publique italienne Trenitalia. «La concurrence doit être loyale et doit permettre aux trois compagnies de faire des bénéfices ou, à tout le moins, de ne pas subir de pertes», a poursuivi le ministre.
Contactée lundi par l’AFP, la SNCF n’a pas souhaité commenter directement les propos de M. Puente, renvoyant à des déclarations d’un de ses hauts dirigeants, devant la presse espagnole le 20 mars dernier. «Le modèle de Ouigo en Espagne est basé sur le volume rendu possible grâce à ses rames duplex de 509 places (1018 en unité multiple), permettant ainsi des économies d’échelle et de maintenir des prix bas», avait notamment déclaré Alain Krakovitch, président de Ouigo España et directeur TGV-Intercités de SNCF Voyageurs, a rappelé la SNCF. «Plus de 50% des clients de Ouigo sont des clients qui n’avaient jamais pris le train avant, et la moitié sont des clients qui ont choisi le report modal. Ils ont opté pour Ouigo plutôt que l’avion ou la voiture», avait-il ajouté, indique la SNCF.
Dans un article publié lundi sous le titre «Guerre ouverte entre le ministère des Transports et Ouigo à cause de la baisse continue des prix», le quotidien catalan La Vanguardia souligne, citant un rapport de la CNMV (Commission nationale du marché des valeurs) sur les trains à grande vitesse, que cette lutte à trois a fait chuter les prix de 40% par rapport à l’époque où Renfe disposait encore du monopole, il y a trois ans. Selon le quotidien de Barcelone (nord-est), le gouvernement espagnol considère que la politique tarifaire pratiquée par Ouigo ne serait pas possible sans l’accord des autorités françaises, dans la mesure où la SNCF est une entreprise publique. Ouigo est présente en Espagne depuis mai 2022.