Des munitions de chasse en vente chez les buralistes aux côtés des cigarettes et autres chewing-gums ? L’idée peut étonner, mais elle est bel et bien sur la table : les bureaux de tabac devraient être prochainement autorisés à vendre des munitions à destination des chasseurs. La mesure a fait l’objet d’une concertation ce mercredi avec la fédération des chasseurs et le ministère de l’Intérieur. «Cela se fera sans aucun doute, très certainement dès le premier trimestre 2024», indique au Figaro le président de la confédération nationale des buralistes, Philippe Coy.
Contacté, le ministère de l’Intérieur précise ce changement au Figaro. À compter de début 2024, l’État va mettre en place des «certifications allégées pour les activités périphériques au métier d’armurier», indique-t-on. Si, pour l’heure, un diplôme d’État d’armurier ou une certification spécifique sont nécessaires pour pouvoir vendre des munitions, les règles vont évoluer à partir du 1er janvier prochain. «Pour la seule vente de munitions des catégories C (pour la chasse, principalement) et D», une certification «vente exclusive de munitions» pourra être obtenue. Elle sera donnée «après réussite à un examen», consécutif à une formation «adaptée et ciblée de deux jours».
Une fois la certification obtenue, le professionnel qui voudra vendre ces munitions devra ensuite obtenir le feu vert du préfet, qui examinera «le titre de compétence et l’honorabilité du commerçant», et fournira «une autorisation de vente de munitions». De son côté, le vendeur devra s’assurer que les munitions ne sont pas accessibles directement par les clients, et il devra vérifier «le titre d’acquisition de l’acheteur», comme un permis de chasse ou une licence pour les participants de la fédération de ski pour le biathlon.
Les buralistes se montrent très intéressés par cette opportunité qui peut à la fois leur permettre de renforcer leur offre, et de rendre service aux chasseurs. Le but est d’apporter «une offre complémentaire à celle des armuriers, dans les zones rurales les plus éloignées», estime Philippe Coy.
Les bureaux de tabac sont en effet légion dans les zones rurales – 41% des buralistes exercent dans les communes de moins de 3500 habitants – quand les armuriers ne cessent de se concentrer dans les grandes villes, au dam des chasseurs. Pour le ministère de l’Intérieur, ces professionnels bénéficient aussi de locaux sécurisés. Leur maillage du territoire permettra de «limiter les déplacements pour l’acquisition de munitions de chasse», et fera baisser, dans le même temps, «la vente par voie postale, source de problématiques récurrentes», juge l’entourage de Gérald Darmanin.
Reste qu’il faudra patienter encore un peu avant de voir les munitions d’armes côtoyer les paquets de cigarette sur le zinc des buralistes, le temps que les professionnels se forment, si possible «en e-learning», espère le représentant. «Il reste beaucoup de points à superviser, reconnaît Philippe Coy. Cela va répondre à une vraie demande des buralistes, qui sont soucieux de diversifier leur profession». La marge que tireront les vendeurs des munitions n’est pas encore connue. Le patron de la confédération précise au passage que de nombreux buralistes exercent déjà une activité d’armurier sur le territoire, en particulier dans les zones rurales.
Cette évolution n’est toutefois pas du goût de tous. «Le gouvernement utilise tous les moyens pour flatter le lobby de la chasse et des armes», s’est indignée la porte-parole du Parti animaliste, Muriel Fusi, sur X – ex-Twitter. «Le lobby de la chasse n’a vraiment honte de rien», s’est agacée, de son côté, l’association L214.