C’est le premier mouvement stratégique de Société générale sous la direction de Slawomir Krupa. Deux semaines après sa prise de fonction en tant que directeur général (le 23 mai), la banque a annoncé jeudi réduire la voilure en Afrique. Elle s’apprête ainsi à céder quatre de ses filiales, au Congo, Guinée équatoriale, Mauritanie et au Tchad à deux groupes bancaires panafricains – Vista et Coris. Société générale pourrait également quitter la Tunisie où elle est présente via l’Union Internationale de Banques (UIB), dont elle détient 52,34 % du capital.

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« Une réflexion stratégique a été ouverte », précise le groupe au logo rouge et noir. Ces retraits interviennent après l’arrêt il y a un an de Yup, sa solution de paiement mobile panafricaine (Cameroun, Sénégal, Côte d’Ivoire…), sur laquelle elle avait beaucoup misé. Or, celle-ci n’a pas résisté à la concurrence d’acteurs télécoms comme Orange Money et surtout de la start-up de paiement américaine Wave.

Société générale assure qu’elle reste toutefois présente dans 13 pays africains, dont le Sénégal, la Côte d’Ivoire ou le Cameroun, où elle occupe « une position de leader » avec « une taille critique ». Ce qui n’était pas le cas dans les quatre pays dont elle se retire, où ses filiales étaient de petite taille.

La présence en Afrique des banques françaises mais aussi européennes s’est réduite comme peau de chagrin ces dernières années. Crédit agricole a été le premier établissement français après la crise financière de 2008 à se séparer de ses filiales en Afrique de l’Ouest. En 2018, c’était au tour du groupe mutualiste BPCE (Banque populaire, Caisse d’Épargne, Natixis) de céder la quasi-totalité de ses banques africaines.

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Même stratégie chez BNP Paribas qui cède elle aussi nombre de ses participations sur le continent (Gabon, Mali, Comores…). «Depuis cinq ou six ans, les banques françaises et européennes, dont la rentabilité est parfois sous pression dans la banque de détail, ont tendance à se recentrer sur leurs marchés domestiques et européens par exemple dans lesquels elles exercent plusieurs métiers », note Nicolas Darbo, associé au cabinet Accuracy.

Ces établissements, qui, il y a plusieurs décennies avaient fondé beaucoup d’espoir sur le continent africain, ne sont pas toujours pas parvenus à prendre des parts de marché significatives dans les pays où ils s’étaient implantés. Et à créer des synergies avec le reste du groupe. « Ils préfèrent donc aujourd’hui réallouer leurs capitaux propres vers d’autres activités plus rentables », font valoir Nicolas Darbo.

D’autres éléments expliquent le retrait des banques occidentales. Le continent africain n’a pas encore tenu ses promesses de développement : l’émergence d’une classe moyenne tarde à se concrétiser. Et sur le plan géopolitique, les tensions restent vives dans plusieurs pays. Sans parler d’un certain sentiment antifrançais.

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Les groupes bancaires tricolores doivent en outre composer sur place avec de nouveaux concurrents souvent panafricains, qui ne cessent de prendre des parts de marché. En tête, la marocaine Attijariwafa bank, désormais omniprésente en Afrique subsaharienne. La gabonaise BGFI ou la togolaise Ecobank ont également le vent en poupe. Sans oublier la percée ­depuis quelques années des banques russes et turques sur le sol ­africain.