Rétropédalage d’urgence. «Depuis que je vis en France, je n’ai jamais vécu des aides sociales, jamais !», s’est offusqué le TikTokeur ALP dans une vidéo postée le 24 décembre. Brusque revirement pour celui qui se vantait jusque-là de «profiter du système» et de «vivre des aides» de la France. Pour rappel, dans une vidéo publiée sur TikTok il déclarait : «c’est les assistantes sociales qui paient mon électricité, mon gaz, l’eau» et «moi, je ne fais rien, j’ai décidé de ne rien faire. Tous les Français vous avez le seum, vous travaillez et payer des impôts pour moi, pour qu’on me paye». Des propos incendiaires qui avaient mis le feu aux poudres et fait réagir la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf), qui verse notamment le RSA et les APL, et la ministre des Solidarités Aurore Bergé.
Face à l’emballement médiatique, l’homme d’une vingtaine d’années s’est empressé de faire machine arrière. Plaidant l’ironie, ALP déclare avoir posté sa vidéo buzz pour «narguer certains Français racistes et fachos». Ses propos ne viseraient qu’à donner du grain à moudre à ses détracteurs. «Cette video que j’ai faite, c’était pour narguer les Français racistes et les Français fachos. Parce qu’à chaque fois que je fais mes lives, j’ai toujours des gens qui m’insultent. J’ai toujours des injures racistes de français qui viennent me dire « rentre chez toi », « t’es tout noir », « tu travailles pas, tu profites de la France » […] Comme ils m’accusent tout le temps que je ne bosse pas, je me suis dit “ok, je vais leur donner ce plaisir, je vais les narguer dans ces vidéos”», plaide-t-il. Le jeune explique avoir tenu des propos comme «les Français vous bossez pour moi» ou encore «les Français vous êtes mes esclaves» car «d’un côté j’avais la haine et d’un côté je voulais narguer tous ces gens».
Et l’individu de se justifier. «Je n’ai jamais touché que ce soit la CAF ou que ce soit le RSA. De toute façon, moi j’ai 19 ans, je n’ai pas l’âge pour toucher le RSA», explique-t-il, déclarant n’être suivi que par la Mission Locale. D’ailleurs, selon lui, les plus attentifs n’auront pas manqué de remarquer que cumuler le RSA et la Mission locale est «impossible». Surtout que «moi j’ai un travail en France, j’ai un boulot. Je vis en France, je paie mon loyer plein pot. Je paie mes impôts. J’ai fait ma déclaration d’impôts. Je paie tout, je suis réglo en France. J’ai mes papiers en France. Je bosse comme tous les Français. Je me lève tous les jours. Parfois je bosse même le week-end», avance ALP.
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Et l’homme n’a pas manqué de tirer sur la corde sensible et de s’épancher en excuses. «La France m’a permis d’avoir mes diplômes, la France m’a permis d’avoir un travail. La France m’a permis de me vêtir. La France m’a bien mis», explique-t-il, «j’ai été élevé en France par une famille d’accueil, purement française, de souche si l’on peut dire. Donc je respecte les Français, je respecte le travail que les Français font en France, et j’aime la France». Et de résumer : «Tout ce que j’ai aujourd’hui, c’est la France qui me l’a donné».
Alors pour clore la polémique, le TikTokeur «demande juste pardon» et «s’en excuse». «Je reçois trop de messages de menace de mort, trop de messages de “on va te lyncher”. C’est abusé, s’offusque-t-il, Après je sais que j’ai cherché, mais je demande pardon a tout le peuple français. Je ne referais plus ce genre de vidéos».
Quoi qu’il en soit, les autorités ont pris en charge le dossier. «L’individu a été identifié et des contrôles sont en cours», écrivait vendredi dernier la Cnaf sur X (ex-Twitter), indiquant qu’«en cas de fraude avérée, une plainte sera déposée à son encontre». La ministre des Solidarités et des Familles Aurore Bergé est elle aussi montée au créneau, appelant à se méfier de ce genre de propos. «Attention aux vidéos d’individus ne cherchant que le buzz et se faisant sur le dos de la vérité et de la solidarité nationale», a averti l’ex-présidente du groupe Renaissance à l’Assemblée nationale.
Cet homme n’est pas le premier à faire l’apologie de la fraude sociale sur les réseaux sociaux. En septembre dernier, un youtubeur surnommé Mertel prétendait dans une vidéo avoir 1800 euros net de revenus mensuels «sans rien foutre» en cumulant diverses allocations. Déjà à l’époque, Aurore Bergé avait tapé du poing sur la table. Par la suite, la ministre avait porté un amendement dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2024, avec son collègue des Comptes publics, Thomas Cazenave, créant un délit d’incitation publique à la fraude sociale (par exemple sur internet ou les réseaux sociaux). Puni de deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 30.000 euros, il verra le jour au 1er janvier.