ChatGPT pourrait-il un jour remplacer les journalistes ? Cette question trotte depuis des mois dans l’esprit des professionnels du milieu. En effet, le robot conversationnel est capable de produire et de modifier des textes en quelques secondes. Une fonctionnalité qui n’a pas échappé au groupe de presse quotidienne régionale, Ebra.

D’après un communiqué du Syndicat national des journalistes (SNJ), la direction de deux titres détenus par le groupe, l’Est Républicain et Vosges Matin, doit mettre en place prochainement une expérimentation de l’usage de cet outil. Objectif, que les secrétaires de rédaction retravaillent avec ChatGPT les textes écrits par leurs correspondants locaux. Ces derniers, qui maillent le territoire de diffusion des quotidiens régionaux, contribuent à collecter et à faire remonter aux rédactions des informations de terrain à proximité de chez eux.

Un Comité social et économique (CSE) a lieu ce jeudi 26 octobre à Nancy avec, à l’ordre du jour, une consultation sur ChatGPT en présence des élus des organisations syndicales de l’Est Républicain-Vosges Matin. La direction et la rédaction en chef présenteront l’expérimentation qu’elles souhaitent mettre en place. « De ce que nous savons déjà, la direction voudrait que les secrétaires de rédaction donnent des indications à ChatGPT pour qu’il corrige et raccourcisse les textes des correspondants locaux», explique au Figaro Éric Barbier, le délégué syndical du SNJ à l’Est Républicain.

Ce dernier se dit inquiet par ce projet : « Demain, des textes publiés dans le journal pourront être réécrits par un robot. Nous savons très bien qu’il s’agit d’une menace, sur le long terme, pour le métier de secrétaire de rédaction, poursuit-il. Nous souhaitons que cette expérimentation fasse l’objet d’un projet d’entreprise en bonne et due forme et que des garde-fous soient mis en place».

De son côté, le président du groupe Ebra, Philippe Carli, estime qu’avant de condamner ce nouvel outil, «il faut qu’on le maîtrise dans un cadre fixé par l’homme et c’est dans cette démarche que nous avons imaginé cette expérimentation», détaille-t-il au Figaro. «Sans pour autant en tirer d’office des conclusions quant aux usages définitifs que nous en ferons».

Ainsi, le directeur général Christophe Mahieu et le rédacteur en chef de l’Est Républicain, du Républicain Lorrain et de Vosges Matin, Sébastien Georges, entendent limiter le test de cet outil « à la stricte relecture et aux corrections de contenus proposés par nos correspondants locaux de presse», détaillent-ils au Figaro. «Dans ce processus, le choix, la hiérarchie de l’information, la première et la dernière relecture ainsi que la validation finale pour publication resteront de la responsabilité des journalistes de notre rédaction», expliquent les deux hommes. «Bien évidemment, le journaliste secrétaire de rédaction pourra également modifier ce contenu corrigé si cela lui semble nécessaire et pertinent.»

«L’arrivée de l’IA générative dans les rédactions est inévitable et notre objectif est de l’anticiper en testant les outils à disposition dans nos process de traitement de l’information», jugent Christophe Mahieu et Sébastien Georges.« C’est un changement d’usage, comme l’évolution vers le digital, mais ça n’est pas pour autant qu’un tel outil remplacera un journaliste», abonde le président du groupe, Philippe Carli.

L’utilisation de ChatGPT devrait être mise en œuvre dans les semaines qui suivront la consultation, l’avis du CSE et des partenaires sociaux. « La durée de cette expérimentation dépendra des résultats obtenus», concluent-ils.