Au terme d’un bras de fer, ponctué par la menace de grève des contrôleurs, les quatre syndicats représentatifs de la SNCF et la direction ont finalement signé un accord sur les fins de carrière. Les cheminots et conducteurs pourront disposer d’une « cessation anticipée d’activité » trente mois avant leur retraite avec quinze mois travaillés rémunérés à 100 % et quinze non travaillés, à 75 %. Une issue « lamentable », déplore Bruno Retailleau, et qui suscite la critique chez Les Républicains (LR).

« C’est un accord qui détricote consciencieusement les acquis de la réforme des retraites », dénonce le chef de file des sénateurs LR. « Finalement, renchérit David Lisnard, le texte reculant l’âge légal de départ à 64 ans, censé rétablir les comptes, voit ses effets annulés à la SNCF. » Une « nouvelle illustration que nous ne sommes pas tous égaux face aux droits sociaux : le monopole et le chantage l’emportent en France sur l’équité, le bon sens et le dialogue », dénonce le maire LR de Cannes. « C’est envoyer un très mauvais signal », insiste Bruno Retailleau. « Celui qui consiste à dire qu’on peut partir, être payés pour ne rien faire dans une entreprise publique sous l’autorité de l’État. » Plus profondément, le sénateur Philippe Tabarot interroge l’exposition de ces salariés à la pénibilité. « Elle existait au XIXe siècle et au début du XXe siècle pour les cheminots. Aujourd’hui, il y a d’autres métiers tout aussi pénibles qui n’ont pas ces mêmes avantages », estime l’élu des Alpes-Maritimes.

La droite pointe plus largement le coût d’un tel accord. « L’entreprise peut-elle se permettre un tel cadeau ? », s’interroge Philippe Tabarot. « Ça va se chiffrer en dizaines de millions d’euros : un coût que va encaisser la SNCF et qui va se répercuter sur le coût du train. Il ne faut pas s’étonner si, aujourd’hui, les billets de train sont chers », fait remarquer Bruno Retailleau. « Au moment où l’on demande de faire des efforts d’assainissement des comptes publics, cet accord enfonce un peu plus la SNCF, et in fine les contribuables et usagers du train, dans le déficit de la dette », ajoute David Lisnard. De plus, estime-t-on à droite, cet accord pourrait entraîner un risque de « contagion ». « Dans le transport public, chez les collègues de la RATP, par exemple, cela va créer une jurisprudence forte, avance le sénateur Philippe Tabarot. Ce précédent pourrait coûter cher là où n’y a jamais eu aussi peu de moyens, et mettre ainsi en difficulté la grande entreprise publique. »

À lire aussiJO-2024: quelles sont les professions susceptibles de faire grève durant la compétition?

Cet accord, fait remarquer la droite, a par ailleurs lieu dans un contexte tout particulier : à mesure que s’approchent les Jeux olympiques de Paris, plusieurs syndicats de la SNCF et de la RATP ont fait planer la menace de grève. « On achète donc la paix sociale, c’est une politique de gribouille », regrette Bruno Retailleau. La période « y est évidemment pour quelque chose dans cet accord », souligne Philippe Tabarot. Le sénateur rappelle par ailleurs la proposition de loi adoptée par la Chambre haute, visant à limiter les grèves dans les transports pendant certaines périodes (vacances, élections et référendum mais aussi, événements « d’importance majeure »), et déposée par le patron de l’Union centriste, Hervé Marseille. Une manière de parer « les abus du droit de grève », conclut Tabarot.