Une sortie d’inflation «sans récession»: la Banque de France dit mardi s’attendre à une économie légèrement moins dynamique qu’espéré en 2023, avant une accélération graduelle jusqu’en 2026 à mesure que les prix continuent de s’assagir. La Banque de France table désormais sur une croissance du produit intérieur brut (PIB) de 0,8% en 2023, contre 0,9% jusqu’ici, en ligne avec la prévision de l’Institut national de la statistique (Insee). «Nous avons procédé à une révision limitée; le ralentissement est incontestable, mais avons échappé à la récession et à la croissance négative», souligne le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, dans la matinale de France Inter ce mardi.

Cette révision tient compte d’un troisième trimestre dans le rouge (-0,1%), pénalisé par des investissements et une consommation des ménages sans vigueur. La croissance devrait ensuite accélérer progressivement à 0,9% en 2024, puis 1,3% en 2025 et 1,6% en 2026 .«On a une confirmation de notre scénario de désinflation avec reprise graduelle de la croissance», a commenté Olivier Garnier, directeur général des statistiques, des études et de l’international à la Banque de France. De bonnes nouvelles confirmées par le gouverneur de la Banque de France : «l’économie française a connu une navigation difficile depuis le Covid et l’invasion de l’Ukraine, nous restons vigilants mais nous sommes un peu plus confiant car l’incertitude diminue. Les choses vont dans bon sens sur inflation», a-t-il assuré au micro de France Inter. L’inflation atteindrait 5,7% en moyenne annuelle en 2023 et tomberait à 2,5% en 2024, mesurée selon l’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH) permettant la comparaison entre pays européens.

La consommation redémarre. Outre les taux élevés décidés par la Banque centrale européenne (BCE) pour refroidir les prix, ce reflux s’explique par une décrue des prix alimentaires et énergétiques, tandis que ceux des services seraient tirés par les hausses salariales. L’inflation continuerait de diminuer ensuite, passant début 2025 sous la barre des 2%, la cible d’inflation de la Banque centrale européenne (BCE), «en l’absence de nouveau choc sur les matières premières importantes»: 1,8% cette année-là et 1,7% en 2026, a détaillé la Banque de France. «C’est non seulement une prévision mais un engagement: nous allons ramener l’inflation à 2% d’ici 2025 au plus tard», a déclaré solennellement le gouverneur de l’institution. Cette désinflation se fera «sans récession», a souligné de son côté Olivier Garnier, précisant toutefois que ces projections s’inscrivaient dans un contexte géopolitique «hautement incertain». Ainsi, après le troisième trimestre négatif, le PIB devrait progresser de 0,1% entre octobre et décembre, selon la Banque de France, alors que la récession se définit comme deux trimestres consécutifs en baisse. L’Insee table, lui, sur une croissance nulle en fin d’année.

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Dès 2024, l’assagissement des prix combiné à la progression des salaires réels redonnera un peu d’air aux ménages, qui verront leur pouvoir d’achat s’accroître et devraient consommer plus ( 1,5% en 2024 après 0,7% en 2023), de quoi soutenir davantage l’activité. Principal pilier de la croissance française, la consommation des ménages profiterait également d’une baisse du taux d’épargne, qui demeure toutefois à des niveaux élevés depuis la pandémie de coronavirus, à un taux anticipé de 16% en 2026. Soutien de l’activité en 2023, le commerce extérieur devrait lui contribuer négativement à l’évolution du PIB l’an prochain.

À partir de 2025, l’effet négatif des taux élevés devrait commencer à s’estomper, selon la Banque de France, ce qui permettrait de relancer les investissements après un creux (-0,4%) attendu en 2024. Avant de redémarrer, les investissements des ménages devraient chuter de 4,1% l’an prochain, notamment dans la construction de logements neufs. Ils seraient davantage affectés par le durcissement des conditions de crédit que ceux des entreprises qui ralentiraient fortement à 0,5%. En 2026, la reprise de la consommation des ménages et les investissements se renforceraient «pour engendrer une reprise dynamique», a estimé la banque centrale. «Les Français utiliseront aussi leur épargne post-Covid pour relancer la consommation […]. L’économie française possède des moteurs solides, mais c’est une reprise progressive, il ne faut pas crier victoire trop vite», prévient François Villeroy de Galhau.

Le taux de chômage, qui augmenterait, de 7,3% en 2023 à 7,8% en 2025, repartirait à la baisse en 2026 (7,6%). «Il faut s’attendre à une remontée modérée, tout en gardant à l’esprit qu’il y a dix ans, lors de la dernière crise économique, on était au-delà de 10% de chômage, donc l’économie française créé quand même beaucoup plus d’emplois», a précisé le gouverneur. Si le taux de chômage attendu dans les prochaines années demeure assez éloigné du plein-emploi (soit 5% de chômage) promis par l’exécutif, le gouverneur se veut optimiste. «L’objectif de plein emploi est une perspective réaliste pour l’économie française dans la prochaine décennie», a-t-il assuré. Plus optimiste encore que la Banque de France, le gouvernement table sur 1% de croissance en 2023 et 1,4% en 2024.