Le sort d’Habitat sera connu le 28 décembre prochain. Le tribunal de commerce de Bobigny rendra à cette date sa décision concernant la liquidation de l’enseigne spécialisée dans l’ameublement, demandée par les administrateurs judiciaires en raison de difficultés financières trop importantes, a appris mercredi l’AFP auprès de l’avocat des salariés. «Toutes les parties ont été entendues aujourd’hui, notamment moi-même pour le compte de la communauté des salariés», a indiqué Maître Arthur-Léo Gandolfo devant le tribunal de Bobigny, à l’issue de l’audience de mercredi, deux semaines seulement après le placement d’Habitat en redressement judiciaire.
L’enseigne, fondée en 1964, compte 25 magasins. Habitat France emploie actuellement 315 salariés et avait généré en 2022 un chiffre d’affaires de 65 millions d’euros. La société mère, Habitat Design International, emploie 68 personnes et affichait en 2022 un chiffre d’affaires de 51,8 millions. Mais la situation financière actuelle de l’entreprise ne laisse aucun espoir à l’un de ses salariés, employé depuis 20 ans chez Habitat, qui a préféré garder l’anonymat : «Tout est fermé, quel fournisseur pourrait nous faire confiance aujourd’hui vu la situation de l’entreprise? Le nom Habitat ne vaut plus rien», déplore-t-il.
Le 30 novembre, Habitat avait annoncé qu’elle demandait son redressement, évoquant «des difficultés financières profondes, largement attribuables», selon elle, «à une gestion antérieure défaillante et exacerbée par des facteurs plus récents» comme l’inflation mais aussi «une baisse significative de la fréquentation des magasins» et «des mouvements sociaux internes ayant perturbé l’activité». «Nous avions demandé une expertise des comptes en octobre 2022», pressentant «de gros problèmes» dans l’entreprise, avait alors déclaré à l’AFP Ratiba Hamache, représentante de la CGT au sein de l’enseigne.
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L’objectif affiché de la direction du groupe via cette procédure était de «stabiliser la situation financière de l’enseigne, qui n’a jamais été profitable en France et d’assurer la viabilité à long terme d’Habitat». Mais dix jours seulement après sa mise en redressement par le tribunal de Bobigny, les administrateurs judiciaires ont annoncé vendredi dernier en CSE (comité social et économique) qu’ils allaient demander la liquidation. «Les conditions ne sont pas réunies pour une poursuite de l’activité, il y a plus d’obstacles que d’opportunités. Potentiellement, il y a eu un problème initial de diagnostic, peut-être qu’il aurait fallu demander tout de suite une liquidation», estime auprès de l’AFP une source proche du dossier.
Si le tribunal prononce la liquidation le 28 décembre prochain, «c’est la fin, tout sera terminé, on licencie les salariés, les baux sont vendus, les stocks sont liquidés», ajoute cette source. Depuis une semaine, les 25 magasins Habitat sont fermés, soit «à la suite d’un droit de retrait exercé par les salariés, soit parce que les directeurs ont décidé de la fermeture en raison d’agressions de la part de clients mécontents» de ne pas recevoir leurs commandes, parfois en attente depuis des mois, «et qui parfois se sont servis directement dans le magasin», indique à l’AFP un salarié.
Il rappelle que «seuls 60% des salaires de novembre ont été versés», que «de nombreux salariés, dont des mères célibataires, sont en grande difficulté financière» et dit en «vouloir énormément à Thierry Le Guénic», le propriétaire, pour sa gestion de l’entreprise. Selon une source proche du dossier, «près de 9 millions d’euros d’acomptes, selon de premières estimations», ont été versés par des clients pour l’achat de meubles et d’autres produits, leurs chances étant minces de récupérer leurs commandes ou leur argent en cas de liquidation.