Samedi 21 octobre, une étrange vidéo aux couleurs du Figaro apparaît sur X via un compte sous pseudonyme. D’une durée d’une minute et demie, elle titre: «Les médias israéliens publient de fausses photos pour prouver les crimes du Hamas.» Elle affirme qu’Israël fait circuler des photos de cadavres d’un feu de forêt en faisant croire qu’il s’agit de victimes des massacres perpétrés par les terroristes du Hamas. Il s’agit d’une fake news.

Logo, couleur, noms des journalistes… tout est semblable à ce que publie la rédaction. Cette vidéo de désinformation n’est pas la première usurpation qui vise le journal. Mais sa réalisation technique, et le soin apporté aux détails, est d’un niveau professionnel.

Lundi matin, la vidéo affiche 20 000 vues. Que faire? Ne rien dire? Déclarer qu’elle est fausse, mais lui donner de la visibilité? Prévenir de son existence sans la montrer? Les journalistes en charge des réseaux sociaux activent la procédure de signalement sur X. Il faut décliner son identité, la prouver, puis expliquer en quoi l’un des plus grands journaux français a été plagié pour induire l’opinion publique en erreur.

En parallèle, la rédaction alerte son point de contact chez X France. Ce dernier recommande de signaler un problème de droits d’auteur dans un autre formulaire, puis ajoute qu’il fera remonter la demande. Il est 12 h 30.

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Lundi après-midi, la vidéo est reprise par de nombreux comptes: des robots, des utilisateurs lambda, et parfois des militants qui l’utilisent comme un argument d’autorité. «Même Le Figaro le dit!» La fausse vidéo cumule plus de 100.000 vues. La rédaction publie alors ce message sur son compte officiel: «Une vidéo, attribuée au Figaro, qui met en doute la réalité des crimes commis par le Hamas à l’encontre d’Israël, circule actuellement en reprenant notre charte graphique. Cette vidéo est fausse et malveillante.»

Très vite, une note ajoutée par des membres accrédités du réseau social apparaît sous les images: «Cette vidéo usurpe l’identité graphique du Figaro. L’auteur de cette vidéo n’est pas Le Figaro.» Une question: comment un réseau social peut-il confirmer qu’une vidéo est fausse sans la retirer? Et ce alors qu’elle expose nos reporters sur le terrain en France comme au Proche-Orient?

Mardi à 12 h 18, plus de 24 heures après le début des échanges, X nous envoie cet e-mail. «Bonjour, nous vous écrivons pour vous informer que nous avons examiné vos allégations de violation du droit d’auteur. Nous avons désactivé le contenu que vous avez signalé sur notre site.» C’est une bataille gagnée, mais la guerre sera longue. La vidéo, signalée également sur la plateforme de la police Pharos, circule toujours sur des comptes bien moins visibles. La note ajoutée cette fois-ci par X stipule: «Média manipulé. Soyez au fait de l’actualité.»