Le gouvernement s’attaque de nouveau à la question de l’emploi des seniors. Ce jeudi, Elisabeth Borne a estimé que se «passer de leur expertise et de leur expérience (était) un immense gâchis». «Nous ne pourrons pas atteindre le plein-emploi sans relever ce défi», a déclaré la première ministre lors de l’évènement «Impact PME» organisé par la Confédération des PME (CPME) à Paris, appelant les partenaires sociaux à trouver «des solutions nouvelles et ambitieuses».

Quelques heures auparavant, Bruno Le Maire était également revenu sur ce sujet. Une semaine après ses propos ayant déclenché une polémique sur le chômage des seniors, le ministre de l’Économie et des Finances a précisé ses propositions sur France Inter, présentées comme «un vrai plan d’action pour l’emploi des plus de 55 ans». Le patron de Bercy s’est d’abord félicité d’avoir remis ce sujet sur le devant de la scène. Souhaitant mettre fin à «un certain nombre d’hypocrisies» du modèle social français, il a avancé des «mesures très concrètes» visant à favoriser l’emploi des seniors et lutter contre leur mise à l’écart précoce du marché du travail. D’abord, toutes les personnes entre 35 et 45 ans exerçant un métier «difficile […], pénible» devraient avoir un «droit automatique à une nouvelle qualification, formation», afin d’éviter de terminer sa carrière dans une profession éprouvante.

Ensuite, le ministre a plaidé pour une «sortie progressive» du marché du travail pour les plus de 55 ans. Ils pourraient ainsi disposer de contrats leur permettant de travailler 80% du temps, tout en touchant «90% de leur salaire et 100% de leurs cotisations retraite». Un moyen de les accompagner progressivement vers la retraite, tout en les gardant en poste et en permettant aux entreprises de bénéficier de leur «savoir-faire», a-t-il argumenté. Reste à définir, toutefois, qui paierait la différence entre le salaire et le temps de travail effectif, un point «dont il nous faut discuter» avec les partenaires sociaux, a précisé Bruno Le Maire. Ce dispositif permettrait toutefois de lutter contre le chômage des seniors, amenant ainsi des cotisations supplémentaires dans les caisses de l’État.

L’alignement de l’indemnisation chômage sur les autres actifs peut aussi être discuté, a-t-il plaidé. Il a également promis de faire prochainement d’autres mesures «fortes» en faveur de l’emploi des plus jeunes, toujours dans l’objectif d’atteindre le plein-emploi d’ici la fin du quinquennat.

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La semaine dernière, Bruno Le Maire s’était déjà prononcé pour une réforme de la durée d’indemnisation chômage des seniors, dont le taux d’emploi atteignait, en 2022, 66%, bien en deçà des 25 à 49 ans – 82,5%. Un «scandale», s’est-il insurgé, au micro de Franceinfo, dénonçant un système qui consiste à mettre à l’écart les plus âgés, pour laisser la place aux plus jeunes. Il a ainsi défendu une transformation qui permettrait aussi de lutter contre la mise «à la retraite de manière anticipée» déguisée de ces travailleurs. Leur protection étant plus étendue que les autres actifs, ceux-ci peuvent être mis à la retraite de manière anticipée. «Pourquoi 27 mois ?», a ainsi fait mine de s’interroger Bruno Le Maire.

Ce n’est pas la première fois que ces sujets sont abordés par le gouvernement. Lors de la présentation du projet de réforme des retraites, l’an dernier, la première ministre avait déjà indiqué vouloir réformer le compte professionnel de prévention (C2P). Objectif : l’utiliser pour permettre aux travailleurs exerçant un métier pénible de se réorienter. S’il existe déjà un système de retraite progressive dans l’Hexagone, le patron de Bercy souhaite aller plus loin. Il a ainsi cité en exemple les «pays du nord de l’Europe», à l’instar de ce qu’avait fait Olivier Dussopt ces derniers mois, en saluant l’exemple suédois. Même constat pour la députée (Renaissance) Astrid Panosyan-Bouvet, membre de la commission des affaires sociales et du groupe d’étude sur l’adaptation de la société au vieillissement : «On sait ce qui marche avec l’exemple de la Finlande : un plan méthodique et global. Santé au travail, formation professionnelle, retraite progressive, changement de nos représentations culturelles des seniors en entreprise… Il faut mener de front tous ces sujets», a-t-elle indiqué à nos confrères du Monde, ce jeudi.