Tâtonnements ou ballons d’essai ? Si Gabriel Attal a répété jeudi soir sur BFMTV son souhait de réformer l’assurance-chômage, le premier ministre a semble-t-il changé son fusil d’épaule sur la méthode utilisée. Après avoir évoqué fin mars au 20H de TF1 une réduction de la durée d’indemnisation des chômeurs, aujourd’hui de 18 mois maximum, sans «aller sous les 12 mois», celui-ci penche aujourd’hui finalement plutôt vers un autre levier.
C’est en tout cas ce qu’il a déclaré dans l’émission «Face à BFM» jeudi soir, à l’occasion de ses 100 jours à Matignon. S’il a rappelé les trois leviers existants – la durée d’indemnisation, la condition d’affiliation, soit «combien de temps il faut avoir travaillé pour toucher l’assurance chômage, c’est six mois dans les 24 derniers mois», et le niveau d’indemnisation -, c’est finalement la seconde option qui semble avoir sa préférence.
«J’ai annoncé qu’on concerterait les partenaires sociaux sur ce sujet. C’est ce que va faire la ministre du Travail Catherine Vautrin, je le lui ai demandé, dans les prochains jours, les prochaines semaines, afin qu’on puisse faire cette réforme», a rappelé Gabriel Attal. Et le premier ministre de pointer du doigt «un système qui s’est organisé pour des multiplications de petits contrats, des contrats courts, entre lesquels on bénéficie du chômage : “Je travaille quelques mois, je touche le chômage quelques mois, je retravaille quelques mois, je touche le chômage”». «C’est plutôt ça sur quoi je veux travailler, donc ça oriente plutôt sur les conditions d’affiliation. Maintenant les trois possibilités sont ouvertes et on y travaillera avec les partenaires sociaux», a conclu le premier ministre.
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Le plus jeune locataire de Matignon de la Ve République a par ailleurs rappelé qu’il avait annoncé en mars, avant même l’échec de négociations entre syndicats et patronat sur l’emploi des seniors, une réforme de l’assurance-chômage dès cette année, dans le but de relever le taux d’emploi en France. «Si on avait le même taux d’emploi que les Allemands, on n’aurait quasiment pas de problèmes pour équilibrer notre budget», a affirmé Gabriel Attal. «On a un intérêt collectif à ce qu’il y ait plus de Français qui travaillent», a-t-il ajouté.
Ainsi, il a répété que la réforme de l’assurance-chômage qu’il souhaite vise «à mieux accompagner les Français vers l’emploi, et à les inciter à reprendre un emploi». Quant aux critiques, notamment des syndicats, sur le non-respect des engagements du gouvernement sur la modulation des règles en fonction de la conjoncture, Gabriel Attal s’est défendu. Pointant d’abord la baisse du chômage depuis la première élection d’Emmanuel Macron, le premier ministre a mis en avant les prévisions économiques, notamment de la Banque de France, prévoyant «un rebond économique assez fort au début de l’année 2025». «Il faut qu’on ait des règles prêtes pour cet horizon-là, c’est totalement cohérent avec l’idée d’accompagner quand la situation se dégrade, et de revoir les règles quand la situation se tend» a-t-il estimé.
La proposition de Gabriel Attal ne convainc pas la CFDT, premier syndicat de France, qui critique plus largement l’esprit de la réforme de l’assurance- chômage voulue par l’exécutif. Jugeant que l’objectif de plein-emploi était «le faux nez présenté par le gouvernement», la secrétaire générale de la CFDT Marylise Léon a jugé ce vendredi matin sur Franceinfo «inacceptable» et «pure folie» de «continuer de se dire qu’il faut taper sur les plus fragiles».
«Les objectifs du gouvernement sur l’assurance-chômage, c’est de taper sur les plus fragiles, diminuer leurs droits pour récupérer de l’argent et faire les poches des chômeurs pour régler une partie de la question du déficit», a-t-elle martelé. Sur la piste des conditions d’affiliation évoquée par Gabriel Attal, Marylise Léon a par ailleurs invité le premier ministre à «aller voir les responsables d’entreprises qui proposent ces types de contrats» courts.