Bon gré, mal gré, Apple devra être en conformité avec la réglementation européenne le 7 mars. Mais jusqu’ici, le compte n’y serait pas. Un groupe de 34 entreprises ou associations professionnelles, actives dans l’économie numérique, dénonce dans une lettre à la Commission européenne les mesures annoncées par Apple pour se conformer à partir de jeudi aux nouvelles règles renforcées de concurrence dans l’UE. «Nous sommes très préoccupés par le fait que le plan proposé par Apple pour se conformer au règlement sur les marchés numériques (DMA) (…) ne répondra pas aux exigences de cette législation», écrivent ces groupes issus de plusieurs pays européens. Parmi les signataires se trouvent les services de streaming musical Deezer et Spotify, l’association de start-up France digitale, l’association européenne de la Fintech EFA (technologies financières) ou encore l’Association européenne des éditeurs de journaux ENPA. Leur courrier, daté du 1er mars, est adressé aux commissaires européens Thierry Breton et Margrethe Vestager, chargés de la nouvelle législation.

Apple, ainsi que cinq autres géants du numérique – Alphabet (Google), Amazon, Meta (Facebook, Instagram), Microsoft et ByteDance (TikTok) -, ont jusqu’au 7 mars pour se mettre en règle avec le DMA. Ce nouveau règlement entend mettre fin aux abus de position dominante dont ils sont accusés, et leur impose une série d’obligations et d’interdictions, sous peine de très lourdes amendes. Ouvertement hostile au DMA, Apple avait annoncé le 25 janvier plusieurs modifications de son système d’exploitation iOS, qui équipe ses célèbres téléphones iPhone. La marque à la pomme affirme par exemple qu’elle autorisera des magasins d’applications concurrents de son App Store et qu’elle s’ouvrira à d’autres services de paiement sans contact que sa solution Apple Pay, comme elle y est contrainte. «Les nouvelles conditions d’Apple non seulement ignorent l’esprit et la lettre de la loi, mais si elles restent inchangées, elles tournent en dérision le DMA», estiment pourtant les 34 organisations dans leur missive.

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Depuis le début de l’année, les groupes concernés par le DMA multiplient les annonces pour se conformer. Mais de nombreux experts ou entreprises du secteur ont exprimé des doutes sur l’efficacité réelle de ces changements, dénonçant des réformes de façade qui n’apporteront pas les bénéfices attendus pour les consommateurs et les entreprises concurrentes. «Une fois les solutions de mise en conformité connues la semaine prochaine, elles devront être analysées correctement par la Commission et les parties prenantes, dans leur intégralité et pas seulement sur la base de quelques annonces», a souligné samedi la Commission, contactée par l’AFP au sujet de la lettre. «Nous n’hésiterons pas à agir», en cas d’infraction, a-t-elle prévenu. Apple est particulièrement visé par le DMA, car le géant californien a construit son succès sur un écosystème fermé dont il contrôle tous les paramètres, invoquant une sécurité accrue pour ses utilisateurs. Cette philosophie est en opposition frontale avec l’ouverture à la concurrence prônée par l’UE.