De la création du stéthoscope à la mise au point des vaccins contre la rage, la tuberculose et la diphtérie jusqu’à la découverte de la maladie de Charcot, l’évolution de la médecine française a été marquée par de nombreuses avancées. Ces découvertes, nous les devons à de grands chercheurs et médecins. Bien qu’ils aient parfois été décriés pour leurs travaux, qui n’ont jamais cessé d’inspirer nos contemporains.
Considéré comme le « père de la chirurgie moderne », Ambroise Paré s’est spécialisé dans les blessures de guerre grâce à sa participation à de nombreuses campagnes militaires. Il perfectionne son exercice de la chirurgie à l’occasion de nombreux moments historiques tels que la bataille du Pas de Suse (1537), le siège de Perpignan (1542) puis ceux de Boulogne (1544) et de Metz (1552). À cette époque, les blessures de guerre, causées par des armes à feu d’un nouveau genre, obligent les médecins à développer des instruments adaptés. Au lieu de privilégier systématiquement l’amputation, Paré développera notamment la technique de ligature des artères. Il améliorera également le traitement des luxations, des trépanations (ouverture du crâne) ainsi que des plaies ouvertes en s’abstenant de recourir à l’huile bouillante, comme c’était l’usage. Ayant eu vent de ses mérites, Henri II l’attacha à son service en 1553. Ambroise Paré gagnera ensuite la confiance de Charles IX qui lui décerna le titre de « Premier chirurgien du roi » (1562).
Après avoir fait ses études en France puis à Leyde, en Hollande, La Mettrie devient médecin du régiment des Gardes-Françaises en 1742. À la fois philosophe et médecin, il aborda la médecine avec un point de vue novateur. Ayant survécu à la «fièvre ardente», une très forte poussée de fièvre pouvant être létale à l’époque, il en tira des conclusions matérialistes selon lesquelles toute chose est composée de matière, y compris certains phénomènes psychiques. Faisant part de ses recherches dans L’Histoire naturelle de l’âme (1745), il heurta les esprits au point que son ouvrage fut brûlé et qu’on l’obligea à s’exiler à Leyde. Cependant, sa réputation le rattrapa en Hollande où il n’eut d’autre choix que de fuir à nouveau. Finalement c’est le roi de Prusse Frédéric II qui l’accueillit à Berlin et lui permit de continuer l’exercice de son métier. Tout à tour condamné par les philosophes des Lumières, tels que Voltaire et Diderot, ce n’est qu’en 1748 qu’il fut reconnu pour ses travaux, en intégrant l’Académie royale des sciences et des lettres de Berlin. Il meurt prématurément d’une indigestion sans avoir pu remettre les pieds en France.
Célèbre pour avoir été le médecin de Napoléon Ier, Jean Nicolas Corvisart devient docteur en médecine en 1782. D’un tempérament rebelle, il est interdit à l’hôpital des Paroisses pour avoir refusé de porter la perruque et est contraint de prendre un poste dans un hôpital pour pauvres de Saint-Sulpice. Après la suppression de l’enseignement de la médecine par la Révolution, une nouvelle École de médecine est créée en 1794 où Corvisart se distingue par son excellence. Professeur au Collège de France, titulaire de la chaire de médecine en 1797, il est distingué par Napoléon Bonaparte qui le nomme médecin du couple impérial en 1804. Ses travaux ont surtout porté sur la cardiologie, avec le perfectionnement de la technique de percussion thoracique utilisée dans le diagnostic de certaines maladies du cœur. Atteint d’hémiplégie, il cesse son activité de médecin pour se consacrer à l’enseignement.
Passionné de chirurgie, qu’il étudie à l’Hôtel-Dieu de Lyon, Xavier Bichat est contraint d’interrompre ses études à cause de soulèvements populaires. Il s’engage alors dans la Garde nationale en tant que chirurgien militaire. Père de l’histologie moderne (la science de la structure des tissus vivants), il consacre sa pratique à l’étude des tissus humains et écrit plusieurs ouvrages dans lesquels il décrit les tissus comme des unités anatomiques de nos organes, avec des propriétés propres. À l’époque, il ne dispose pas encore du microscope et définit 21 tissus différents. L’un de ses plus grands travaux, Anatomie descriptive (1801-1803), fut réalisé à partir de la dissection de près de 600 cadavres. Son œuvre sera achevée par ses étudiants après sa mort due à la fièvre typhoïde.
Inventeur du stéthoscope, René Laënnec commence ses études avec son oncle, alors chef des hôpitaux de Nantes (1796), et suivra les enseignements de Corvisart à Paris. Diplômé en 1804, il devient chef de service à la Salpêtrière et à l’hôpital Necker en 1815. C’est l’année suivante qu’il perfectionne la technique d’auscultation, décrite pour la première fois par un confrère autrichien (Leopold Auenbrugger) 30 ans plus tôt. De là naît le premier stéthoscope : simple cahier enroulé et accolé à la cage thoracique, celui de Laennec est bien loin du stéthoscope en métal de nos contemporains. Quoi qu’il en soit, cette innovation révolutionne la médecine anatomo-clinique et l’identification de pathologies cardiopulmonaires. En 1819, Laënnec publie son Traité de l’auscultation médiate puis est nommé à la chaire de clinique interne de la Charité. Applaudi pour ses travaux sur la tuberculose, il succombe, par une triste ironie, à cette même maladie à l’âge de 45 ans.
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Père de la neurologie moderne, le professeur Charcot est surtout connu pour avoir décrit la sclérose latérale amyotrophique, aussi dénommée de ce fait maladie de Charcot, une pathologie neurodégénérative qui conduit progressivement à la paralysie totale du patient. Élève brillant versé dans l’étude des pathologies neurologiques, Charcot devint en 1862 chef de service à l’hôpital de la Salpêtrière, à Paris, où il enseigna pendant vingt ans. Il fut notamment le professeur de Sigmund Freud et créa, en 1882, la première chaire au monde de clinique des maladies nerveuses. Outre ses travaux sur la sclérose latérale amyotrophique, il étudia la sclérose en plaques, la maladie de Parkinson, le tabès (neurosiphilis), la poliomyélite, mais aussi l’hypnose et l’hystérie. Membre de l’Académie de médecine, puis de la British Medical Association, son prestige le fit connaître partout en Europe. Détenteur du prix scientifique Montyon, décerné par l’Académie des sciences, il se verra remettre la légion d’honneur d’abord en tant que chevalier (1848), officier (1880) puis commandeur en 1892. Il meurt l’année suivante d’un œdème aigu du poumon à l’âge de 67 ans.
Disciple de Pasteur, Émile Roux devient célèbre pour ses travaux en microbiologie et en immunologie. Jeune praticien, il participe d’abord aux projets de recherche de Louis Pasteur sur la fièvre charbonneuse, une maladie touchant essentiellement les animaux herbivores. Mais c’est surtout ses travaux sur la rage, toujours sous l’aile de son fidèle mentor, qui propulsèrent sa carrière. La thèse qu’il dédia à l’étude de cette maladie virale, conduira d’ailleurs à l’élaboration du premier vaccin antirabique. Plus tard, il orientera ses recherches sur l’origine de la diphtérie. Avec le médecin Alexandre Yersin, il isolera pour la première fois la toxine produite par le bacille diphtérique. Se basant sur les recherches de ses paires démontrant que les animaux produisaient des anticorps contre cette toxine, Roux finit par mettre au point un sérum antidiphtérique qu’il testera chez des enfants à l’Hôpital Trousseau et à l’Hôpital des Enfants-Malades. Après ce succès écrasant, qui lui valut le prix Osiris en 1903 (récompensant sur propositions de cinq académies la découverte la plus remarquable dans les sciences, les lettres, les arts ou l’industrie), il devint directeur général de l’Institut Pasteur l’année suivante.
Renommé pour avoir mis au point le vaccin BCG contre la tuberculose avec Camille Guérin, Albert Calmette se passionna très rapidement pour la bactériologie médicale. Il commence à exercer son métier dans la médecine navale à Hong Kong où il étudie le paludisme dans le cadre de sa thèse. Puis il sera envoyé à Saint-Pierre-et-Miquelon et en Afrique occidentale avant de revenir en France pour suivre les enseignements d’Émile Roux et de Louis Pasteur. Chargé par ce dernier de fonder le premier Institut Pasteur hors métropole, à Saïgon, au Vietnam, il promeut la vaccination antirabique à l’étranger tout en poursuivant ses recherches sur les sérums antivenins, le choléra, la fermentation de l’opium et du riz. De retour à l’Institut Pasteur de Lille en 1895, il consacrera ses recherches à l’hygiène publique et à la tuberculose. En 1921, il crée le premier vaccin contre cette maladie redoutable à partir d’un bacille bovin atténué, le « bacille de Calmette et Guérin », ou BCG. Il meurt en 1933 après avoir été successivement élu à l’Académie de médecine (1919), à l’Académie des sciences d’outre-mer (1922) et à l’Académie des sciences (1927).