Le microbiote, cet organe constitué de milliards de bactéries, est devenu une des voies de recherche médicale les plus prometteuses de ces vingt dernières années. Aujourd’hui, on sait que les personnes atteintes de maladies très diverses, allant des maladies intestinales aux maladies psychiatriques, en passant par les maladies métaboliques comme le diabète, l’obésité, ou encore la stéatose hépatique non alcoolique, ont un microbiote différent de celui des personnes en bonne santé.
On y trouve des modifications de composition des populations de bactéries, et surtout une diversité microbienne bien plus pauvre. Mais les modifications du microbiote sont-elles à l’origine de la pathologie, ou bien la pathologie à l’origine des modifications du microbiote ? La question agite encore le monde de la recherche. Plusieurs expérimentations suggèrent cependant qu’un microbiote altéré favorise l’apparition de ces maladies.
À lire aussi«Nos modes de vie ont une influence néfaste sur le microbiote»
Par exemple, les chercheurs ont découvert que la bactérie Akkermansia muciniphila est moins fréquente chez les personnes obèses ou ayant un syndrome métabolique. « Ce qui a intéressé les chercheurs, notamment l’équipe belge du Pr Cani et du Pr Evrard, c’est que la supplémentation en Akkermansia muciniphila des souris obèses permettait non seulement d’abaisser leur poids corporel, mais également de diminuer leur taux de cholestérol et leur glycémie », relate dans son livre, Incroyable microbiote, le Dr Julien Scanzi, gastro-entérologue. Une première étude a été menée sur 32 personnes, avec des résultats très encourageants.
Si toutes ces observations laissent entrevoir de nouvelles voies thérapeutiques, le chemin est encore long avant d’aboutir. « D’autant plus que dans l’obésité, le traitement est complexe, car il existe plusieurs types d’obésité et de diabète que nous ne pouvons pas différencier, et qu’il existe déjà des médicaments efficaces », souligne le Pr Rémy Burcelin, directeur d’une unité Inserm à Toulouse. Pour le spécialiste, actuellement, la piste thérapeutique la plus solide impliquant le microbiote concerne les maladies hépatiques.
À lire aussiLe microbiote, antidépresseur du futur?
C’est dans ce domaine que pourraient arriver les premiers traitements. « L’intestin alimente le foie via la veine porte. Un certain nombre de molécules produites par les bactéries intestinales se retrouvent dans cette veine porte et vont agir sur des cibles du foie, liées à des maladies comme la stéatose hépatique et la fibrose», décrit le Pr Burcelin. « Les chercheurs ont identifié les grandes familles bactériennes impliquées, ainsi que les molécules produites par ces bactéries. Il existe, à partir de là, différentes pistes possibles. Soit on administre les bactéries sous forme de probiotiques. Soit on produit chimiquement les molécules qu’elles produisent et qui agissent sur les cibles. Soit, et c’est plus sûrement ce qui va se développer, on s’intéresse aux cibles de ces molécules », explique le Pr Burcelin.
Peut-être que dans quelques années, il suffira de mâcher du chewing-gum pour perdre du poids ! C’est, en tout cas, ce à quoi travaille le Pr Maria Luisa Balmer, chercheuse à l’université de Berne. Elle expliquait, en novembre, sur le site de La Revue du Praticien qu’elle développe un chewing-gum contenant des fibres alimentaires solubles qui sont de préférence fermentées par un groupe de bactéries intestinales. « Celles-ci mangent et digèrent ces fibres et, ce faisant, produisent des métabolites qui, selon plusieurs études cliniques, sont bénéfiques pour la perte de poids et l’amélioration des maladies métaboliques », affirme la chercheuse.