Correspondant à Jérusalem

C’est une scène que les amateurs de la série israélienne « Fauda »ont l’habitude de voir. Sauf que, cette fois, les personnages déguisés en Palestiniens et progressant, armes à la main, dans les couloirs de l’hôpital Ibn Sina de Jénine, ne sont pas des comédiens. Ce sont des membres d’une unité spéciale israélienne, spécialisée dans les infiltrations au cœur des villes palestiniennes et dont l’opération a été captée lundi soir par le système de vidéosurveillance de l’hôpital, un lieu pourtant protégé par le droit humanitaire international.

L’attaque s’est conclue par la mort de trois jeunes Palestiniens. Ils auraient été exécutés dans leur lit, au silencieux. Des images diffusées sur les réseaux sociaux présentent des oreillers et des lits d’hôpitaux couverts de sang comme ceux où ils ont été tués. Mardi matin, les trois jeunes hommes ont été enterrés dans le cimetière de Jénine dédié aux « martyrs » de la « résistance à l’occupation » par une foule scandant « Allah Akbar ».

L’armée israélienne affirme que ces trois jeunes hommes composaient une « cellule terroriste du Hamas cachée à l’intérieur de l’hôpital ». Profitant de la protection dont bénéficie l’hôpital, le chef de la cellule, Mohamed Jalamneh, 27 ans, « planifiait un raid inspiré des massacres du 7 octobre », affirme l’armée. Selon les services de sécurité israéliens, cet homme était en contact avec un centre de commandement du Hamas à l’étranger et avait fourni des armes et des munitions à des « terroristes » pour organiser un attentat. Mardi matin, un communiqué de la section de Jénine des brigades Al Qassam, le bras armé du Hamas, a déploré la mort de ces « trois fils du peuple palestinien » parmi lesquels, affirme l’organisation, « un des fondateurs de la brigade de Jénine ».

Cette opération survient dans un contexte particulièrement explosif en Cisjordanie. Dans la nuit de lundi à mardi, des actions de l’armée israélienne ont eu lieu à Jénine, Naplouse et Tulkarem. Situées dans le nord de ce territoire occupé depuis 1967 par l’armée israélienne, les trois villes sont au cœur de l’intifada qui couve, depuis des mois, en Cisjordanie. Depuis l’attaque terroriste du 7 octobre et la longue guerre qui s’ensuit, elle a gagné en intensité. Dans la journée de mardi, cinq Palestiniens ont été tués par l’armée israélienne. Selon les Nations unies, ils sont morts au cours de heurts survenus à Jénine, mais aussi dans des villages proches d’Hébron, de Bethléem et de Ramallah. Depuis le 7 octobre, 367 Palestiniens de Cisjordanie ont été tués dans des conditions semblables.

Les services de sécurité israéliens redoutent que soit commis un attentat d’ampleur au cœur même du pays. Mardi, à Haïfa, un homme a foncé en voiture vers des soldats gardant une base militaire, puis il est sorti, une hache à la main. Il s’agit d’un Palestinien d’Israël âgé de 27 ans, qui a été grièvement blessé par les soldats. Mi-janvier, à Raanana, près de Tel Aviv, deux Palestiniens venus clandestinement de Hébron ont perpétré une double attaque faisant un mort et 17 blessés. Le tir de roquettes, d’une intensité inaccoutumée depuis plusieurs semaines, qui a visé, mardi en fin d’après-midi, les villes du centre d’Israël a rappelé que la guerre dans la bande de Gaza est loin d’être finie. Mais pour les Israéliens, la menace peut se concrétiser à tout moment par une attaque survenue au coin de la rue.