Coups de cœur

Au-delà des chiffres étourdissants : un 40e Masters 1000, un septième sacre à Bercy, la quasi-assurance de terminer pour la 8e fois en carrière numéro un mondial en fin d’année, le tout à 36 ans, Novak Djokovic a rappelé quel incroyable compétiteur il était. Lui qui a souffert d’un virus (problème gastrique), n’a pas été au meilleur de sa forme tout au long de la semaine. Si la finale a été une formalité, ses trois précédents matches avaient tous été de longs combats en trois sets, qui avaient duré jusqu’à trois heures. Mais à la fin, c’est toujours lui ou presque qui gagne. Au mental, en immense champion inoxydable. La force de l’habitude. Avec cette capacité unique à serrer le jeu et à jouer toujours le coup juste dans les moments clés même quand il n’évolue pas à son meilleur niveau. L’inoxydable champion ne semble pas rassasié. Décourageant pour la concurrence.

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Plus c’est long, plus c’est bon. Si la durée exceptionnelle de beaucoup de matches a posé des vrais problèmes de programmation et entraîné des polémiques, les amateurs de tennis se sont globalement régalés durant toute la semaine. Ce qui n’était pas gagné par avance. Car si le Masters 1000 parisien réunit chaque année la crème de la crème, il arrive en toute fin de saison. Les organismes sont fatigués et la motivation de certains parfois suspectes. Mais les meilleurs joueurs du monde n’avaient pas la tête aux vacances cette semaine dans la capitale. Douze matches ont ainsi dépassé les 2 heures 30. Ce qui a fait dire au directeur du tournoi Cédric Pioline que l’édition 2023 était « exceptionnelle ». Mentions spéciales au bras de fer entre Humbert et Zverev. Le somptueux duel entre Dimitrov et Medvedev restera dans les mémoires également.

Alors que le déménagement vers la Paris Défense Arena se précise pour 2025, l’édition 2023 a rappelé que le Masters 1000 parisien localisé dans l’Est parisien risque de perdre une salle mythique à l’ambiance inégalée. Il n’y a d’ailleurs jamais eu autant de spectateurs que cette année dans l’Accor Arena (170.000 pour la semaine). Et le Central a été plus que jamais un chaudron. C’est dans une ambiance bruyante que les losers magnifiques Monfils, Gasquet et Humbert ont rendu les armes sur le fil. C’est dans une ambiance hostile que Medvedev a évolué contre Dimitrov. Passionné et excessif, le public n’a pas toujours eu raison. Notamment quand il siffle le, il est vrai, provocateur Djokovic à la fin du premier set de la finale. Le public de Bercy n’a en tout pas déçu. Passionné, plus que jamais. De quoi craindre que le tournoi perde son âme en raison du déménagement probable dans deux ans.

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Adresser quelques discrets doigts d’honneur au public parisien, à l’issue de sa défaite contre Grigor Dimitrov, mériterait évidemment un coup de griffe. Mais Daniil Medvedev a de la repartie et quand il est revenu sur son «histoire d’amour» avec le public du Rolex Paris Masters, l’assistance a été conquise par l’humour du Russe. «Un doigt d’honneur ? Oh non, j’ai juste regardé mon ongle comme ça. Pourquoi je ferais ça à ce beau public parisien (…) C’est une question d’alchimie, de mayonnaise. J’ai beaucoup d’amis français. Ils ne semblent pas trop aimer ce tournoi, il y a peut-être une raison. Je joue mieux ici quand il n’y a pas de public. Je gagne quand il n’y a personne.» C’est effectivement en 2020 lorsque le tournoi s’était disputé à huis clos en raison de la pandémie de Covid-19 que le Russe avait remporté le Masters 1000 parisien en dominant Alexander Zverev en finale. S’il n’a joué qu’un match, le roi de la punchline de cette 38e édition c’est bien Medvedev.

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Coups de griffe

L’édition 2023 a été marquée par de gros combats, mais aussi une finale très décevante, sans suspense. Une victoire (6-4, 6-3) du maître des lieux qui a profité, il est vrai, des nombreuses fautes directes de son adversaire. Crispé le Bulgare Grigo Dimitrov n’est jamais vraiment rentré dans son match, accumulant les fautes directes (16). Une énième et ultime erreur en revers l’a plongé dans un grand désarroi sur sa chaise. Ses quelques tentatives offensives auront fait pschitt. À l’image de la finale à oublier. Un pétard mouillé après un feu d’artifice.

Avec seulement un qualifié au 2e tour (Ugo Humbert), les Bleus ont réalisé leur pire performance depuis la création du tournoi en 1986. En 1996 et 1999, seuls deux représentants avaient atteint le deuxième tour. 2023 fait donc pire. Ils étaient huit au départ, il n’en restait plus qu’un au 2e tour. Après l’élimination d’Humbert, battu après un énorme combat face à Alexander Zverev (6-4, 6-7, 7-6), il n’y a pas eu de présence tricolore au stade des 8es de finale. À la fin c’est la France qui perd. Comme l’autre vétéran tricolore Richard Gasquet lundi soir, Gaël Monfils s’est incliné sur le fil avec des balles de match et des regrets. Comme trop souvent, les Français s’illustrent parfois dans les tournois mineurs, mais dès que la marche est haute, ils trébuchent trop rapidement. Mais la réelle déception du tournoi restera le grand espoir Arthur Fils, complètement passé au travers de son premier tour.

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Retiens la nuit à Bercy. La session nocturne de lundi s’était achevée lundi à 02h22, celle de mercredi à 02h37, Jannik Sinner, numéro 4 mondial, initialement attendu jeudi sur le court à peine une quinzaine d’heures après sa victoire en pleine nuit a invoqué son état de «fatigue» pour justifier sa décision de se retirer. Triple finaliste en Grand Chelem, Casper Ruud s’est lâché sur X. «Bravo l’ATP, belle manière d’aider un des meilleurs joueurs du monde à récupérer et à être aussi prêt que possible quand il a fini son précédent match à 2h37 du matin. 14h30 pour récupérer. Quelle blague». Les organisateurs ayant eu la riche idée de programmer le huitième de finale entre Sinner et Alex de Minaur en quatrième match de la journée, et non en session de soirée… Un bug. Comme ces nombreux spectateurs qui ont dû patienter dehors, parfois plusieurs heures comme mercredi soir, quand en raison des 3 heures 30 du bras de fer Zvrerev – Humbert, la session nocturne a débuté, initialement prévue à 19h30, a débuté à 22 heures…

Décidément, Bercy ne réussit pas à Carlos Alcaraz. Il avait chuté contre Hugo Gaston en 8es il y a deux ans et avait abandonné l’an passé lors de son quart de finale contre Holger Rune, victime d’une déchirure musculaire au niveau de l’abdomen. En 2023, l’Espagnol a été dominé dès son entrée en lice par le surprenant Roman Safiullin. Clairement pas à 100% et peu en verve, l’Espagnol n’a été que l’ombre de lui-même. Depuis son sacre à Wimbledon aux dépens de Novak Djokovic en juillet, le prodige est dans le doute, loin de ses standards habituels, lui qui a connu une tournée asiatique mitigée, avec des éliminations en demi-finales à l’ATP 500 de Pékin et en huitièmes au Masters 1000 de Shanghaï. Dommage pour le public parisien.

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