Hillary Clinton, incapable de marcher, vacillante, soutenue par des gardes du corps, littéralement hissée dans un van. Ces images filmées en 2016, en pleine campagne présidentielle aux États-Unis avaient fait le tour du monde et avaient été dévastatrices pour la candidate. Âgée de 68 ans, la femme politique souffrait d’une pneumonie. Cette inflammation des poumons, habituellement causée par une infection virale ou bactérienne peut frapper à tout âge. Dans les pays pauvres, elle est connue pour être la principale cause de mortalité chez les enfants de moins de 5 ans. Mais, dans les pays industrialisés, elle est surtout redoutable pour les plus âgés. Ainsi, à 100 ans, ce n’est plus le cancer qu’il faut redouter, mais bien la pneumonie. À cet âge, les principales causes certifiées de décès sont en effet la vieillesse ou la pneumonie, selon une étude anglaise parue dans la revue scientifique Plos One en 2014.

En France, 90 % des 10.000 morts annuelles par pneumonie ont plus de 65 ans (en dehors de la pandémie de coronavirus). Une fragilité qui a plusieurs causes. « Tout d’abord avec l’âge, il y a une altération des fonctions de défenses immunitaires des poumons », explique le Pr Bruno Housset. C’est ce que les spécialistes appellent l’immunosénescence, dont on a beaucoup entendu parler pendant la pandémie de Covid-19. Mais, les moyens mécaniques de défenses des poumons sont également amoindris. « Il y a notamment une diminution de l’efficacité de la toux. Pour tousser, il faut un effort violent d’expulsion de l’air et des sécrétions. Or, en vieillissant, les cartilages bronchiques se compriment lorsque l’on tousse et vont écraser les bronches. L’évacuation de mucus, qui permet d’évacuer les germes se fait moins bien », poursuit le Pr Bruno Housset. À cela s’ajoute des problèmes de fausses routes à la déglutition. « Ce sont alors les bactéries présentes dans la bouche, qui peuvent provoquer des infections des poumons », explique le Dr Olivier Leleu pneumologue au CH d’Abbeville.

Autre danger, le retard de diagnostic. Dans sa forme typique, la pneumonie débute brutalement, avec une douleur thoracique en « coup de poignard » et une fièvre élevée (plus de 40 °C). « Chez les plus âgés, les symptômes sont souvent atypiques : il n’y a pas de douleur thoracique et la fièvre est moins forte. De plus, le marqueur sanguin de l’inflammation, la CRP, est souvent basse à la phase précoce », explique le Dr Olivier Leleu. Une difficulté de diagnostic qui peut entraîner un retard de traitement. « Or, il faut mettre les patients le plus rapidement possible sous antibiotiques car plus on tarde, plus la mortalité est élevée », poursuit-il.

Enfin, à partir de 65 ans, il n’est pas rare de souffrir d’autres maladies, comme une insuffisance cardiaque ou une bronchopneumopathie chronique obstructive qui fragilisent les personnes. « La dénutrition, fréquente chez les plus âgés, est aussi un facteur de fragilité important », rappelle Olivier Leleu. Un épisode d’infection comme une pneumonie aggrave les maladies existantes et altère l’état général. « On a des personnes dont l’épisode de pneumonie aiguë évolue favorablement mais qui dans les mois qui suivent vont décéder car elles décompensent un diabète, une insuffisance cardiaque, une insuffisance rénale… Ces morts sont bien la conséquence de leur infection pulmonaire », explique le Dr Olivier Leleu.

Le premier vaccin efficace pour éviter une pneumonie, c’est le vaccin contre la grippe. Et désormais, celui contre le coronavirus. Il s’agit de vacciner les plus âgés, mais, comme le vaccin est moins efficace chez eux, il est également important d’immuniser leur entourage. Faut-il également se vacciner contre le pneumocoque ? « Il est recommandé chez toutes les personnes immunodéprimées ou souffrant d’une maladie prédisposant à la survenue d’une infection à pneumocoque », précise le Pr Bruno Housset. La liste est longue : diabète, insuffisance cardiaque, asthme, BPCO…