Dans l’excellente comédie de mœurs, Un Homme à la hauteur, le réalisateur Laurent Tirard (Le Petit Nicolas, Astérix et Obélix: au service de Sa Majesté) aura su utiliser avec une rare maestria tous les artifices des effets spéciaux pour réduire sensiblement la taille de son héros incarné par Jean Dujardin amoureux ici de l’actrice Virginie Efira. Ce film sorti en 2016 continue de faire florès sur Netflix qui l’a introduit avec bonheur dans son catalogue.
À l’instar de son illustre prédécesseur, le magicien-cinéaste Georges Méliès (1861-1938), Laurent Tirard, le cinéma scientifique aidant, a donc revisité toutes les techniques de l’image pour réussir ce tour de force: faire croire aux spectateurs qu’un acteur de 1,82 m sous la toise pouvait passer à l’écran pour un séducteur de petite taille de quelque 1,36 m.
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En bon directeur d’acteurs qu’il est, le cinéaste s’est d’abord reposé sur le talent de ses saltimbanques. Dans un entretien accordé à nos confrères de BFMTV, Virginie Efira a expliqué comment lors des répliques, elle et Alexandre alias Jean Dujardin ont joué de l’orientation de leurs regards: « Je regardais vers le bas tandis que Jean regardait vers le haut». Simple à dire mais pas si facile à exécuter, reconnaissons-le.
La mise en scène, l’utilisation d’accessoires ont aussi rendu beaucoup de services. L’usage d’une estrade pour surélever la comédienne ou le fait de se mouvoir sur une chaise à roulettes ont facilité l’impression de différence de taille nécessaire à la mécanique de cette romance qui voit une jolie femme, Alexandra, tomber amoureuse d’un Alexandre plein de charme mais d’une grandeur, au sens propre, pour le moins restreinte.
Au-delà du savoir-faire des saltimbanques, des cameramen et bien sûr du chef d’orchestre sur le plateau, Laurent Tirard, des effets spéciaux ont permis de se jouer de la perspective. Particulièrement l’usage d’un fond vert a beaucoup aidé les as du montage lors de la phase de postproduction. Dans ce fond factice, comme lors d’un dessin, il devient alors plus aisé de se jouer des proportions.
Un dernier tour d’illusionniste de la caméra aura enfin été révélé, tel un secret de fabrication farouchement gardé, par Laurent Tirard à la fin du film. Toujours en s’inspirant de George Méliès qui affectionnait tout particulièrement les trompe-l’œil, – on ne peut oublier L’homme à la tête en caoutchouc -, le cinéaste agrandira les pièces et exhumera les procédés de surimpression.
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Techniques artisanales, remontage numérique, jeu d’acteurs… Un homme à la hauteur est non seulement une très bonne comédie de mœurs mais aussi une prouesse cinématographique collective. Yves Rodallec, le directeur d’images de Georges Lautner, réalisateur de la cascade »à la tyrolienne» de Belmondo dans Flic ou Voyou, avait l’habitude de dire, «un bon film est l’addition des talents des acteurs et des techniciens sur le plateau». À leur manière, Laurent Tirard, Virginie Efira et Jean Dujardin ont rendu hommage à ces pionniers indispensables du septième art.