Relever l’impôt mondial sur les sociétés et taxer davantage les milliardaires : un rapport parlementaire préconise lundi de muscler la lutte contre l’évasion fiscale en France en lui accordant aussi plus de moyens, jugeant les efforts du gouvernement «insuffisants».
Malgré le plan de lutte contre les fraudes présenté au printemps par l’exécutif, «les résultats du contrôle fiscal restent médiocres, les effectifs et les moyens dévolus à cette mission restent insuffisants», tacle ce rapport rédigé par la rapporteure spéciale Charlotte Leduc (LFI). La députée évoque «des mesurettes dérisoires» face à une fraude qu’elle évalue entre 80 à 120 milliards d’euros : la lutte contre celle-ci doit être une «priorité nationale», insiste-t-elle.
Il n’existe aucune estimation officielle du montant de la fraude fiscale en France. Pour y remédier, le gouvernement a lancé en octobre un Conseil d’évaluation des fraudes chargé de chiffrer ces phénomènes. Le rapport, qui insiste sur la dimension internationale de la lutte contre la fraude fiscale, appelle la France à «être en pointe» en matière de diplomatie fiscale, «une question de volonté politique». Il appelle à porter à 25% – contre 15% actuellement – l’impôt minimum sur les bénéfices des sociétés, qui se déploie progressivement à travers le monde après la conclusion d’un accord international sous l’égide de l’OCDE, fin 2021.
Concernant le patrimoine des milliardaires, il réclame le vote d’une résolution parlementaire pour que «la France défende la création d’une taxe européenne» à hauteur de 2%. Le document préconise davantage de fermeté envers les paradis fiscaux et un durcissement des mesures entourant les «prix de transfert», ces transactions transfrontalières entre filiales de multinationales visant à minorer les bénéfices et donc l’impôt. Il propose aussi l’instauration d’une taxation unitaire pour les multinationales.
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En France, le rapport s’inquiète d’une «baisse alarmante des effectifs» au sein de la Direction générale des finances publiques (DGFiP) que les 1.500 postes supplémentaires promis par le gouvernement d’ici à 2027 ne pourront pallier. Les douanes doivent aussi être «renforcées». Le développement de nouvelles technologies comme le datamining (traitement des données en masse) «ne doit pas se faire au détriment d’un renforcement de l’expertise humaine», insiste-t-il, estimant aussi nécessaire de créer une base de données commune aux différents services de lutte contre la fraude.
C’est le deuxième rapport annuel sur l’évasion fiscale rédigé par Charlotte Leduc, chargée d’une «mission transversale» sur le sujet. Aucune des recommandations figurant dans la version précédente n’a été mise en œuvre, pointe-t-elle.