«La Lollo» contre «la Loren». En Italie, cette conversation a souvent été soutenue avec ardeur par les amoureux du cinéma. Il faut dire que Gina Lollobrigida et Sophia Loren, puisque c’est d’elles qu’on parle, outre leurs indéniables qualités d’actrice, présentaient l’une et l’autre une beauté à faire tourner les têtes des cinéphiles du monde entier.
Les deux Joconde entretenaient chacune une cour très chic d’admirateurs. Gina pouvait se prévaloir des enthousiasmes d’Humphrey Bogart et d’Orson Welles. Le héros de Casablanca ira jusqu’à oser dire : «Quelle femme ! À côté d’elle, Marilyn Monroe, c’est Shirley Temple !» Le réalisateur de Citizen Kane, ne fera pas non plus dans la dentelle. Il la gratifiera même d’un surnom terriblement flatteur : «La plus belle femme du monde.»
Sophia Loren de quelques années sa cadette, et peut-être naturellement plus modeste, pourra se vanter d’avoir eu elle aussi de très respectés admirateurs. Le grand Vittorio de Sica puis Marcello Mastroianni répéteront à l’envi que pour eux la seule et unique «Divine» de Cinecitta, c’était bien la Loren.
À lire aussiGina Lollobrigida, la reine italienne du cinéma, est morte à 95 ans
À VOIR AUSSI – Gina Lollobrigida, la reine italienne du cinéma est morte à 95 ans
En réalité, la rivalité entre les deux belles fut plus fantasmée que réelle jusqu’en 1955. Cette année-là, c’est Dino Risi le roi de la comédie satirique à l’italienne, qui déclara la guerre au néoréalisme rose incarné par Gina en choisissant de la faire remplacer par Sophia Loren dans le dernier épisode du triptyque de Pain, amour et fantaisie intitulé Pain, amour, ainsi soit-il. L’esthétique rassurante, quasi parfaite de Lollobrigida, qui avait tant charmé et en même temps passionné les Italiens (et les Français), était passée insensiblement de mode. La sublime Esmeralda de Notre Dame de Paris qui avait touché le cœur de Quasimodo devait s’incliner devant la beauté et la sensibilité plus tourmentées de l’Antonietta d’Ettora Scola dans Une Journée particulière.
À lire aussiFanfan la Tulipe, Notre-Dame de Paris… Les plus grands films de Gina Lollobrigida
Pain, Amour et Fantaisie de Luigi Comencini en 1953 avec Gina Lollobrigida, Vittorio de Sica…
La Lollo s’amusera au début de ce duel de bellissima. Elle s’est ingéniée longtemps dans les grands festivals, comme à Cannes en 1961, à jouer la comédie, non plus à l’écran, mais face au paparazzi qui n’en demandaient pas tant. Elle finira par abandonner la lutte face à sa «tendre ennemie» en préférant la photographie aux plateaux de cinéma. Il ne resterait pour l’éternité que le souvenir de l’amoureuse de Fanfan la Tulipe et de l’immortelle Esmeralda de Victor Hugo.
Pain, amour, ainsi soit-ilde Dino Risi avec Sophia Loren, Vittorio de Sica…