Correspondant à Washington
Les États-unis ont promis leurs chars à l’Ukraine pour que l’Allemagne accepte de livrer les siens. La décision américaine de fournir à Kiev des chars de bataille M1 Abrams, qui a servi à surmonter les réticences allemandes, a été confirmée mercredi par l’Administration Biden. Révélée mardi par le Wall Street Journal, elle fait suite à des semaines d’intenses négociations pour convaincre Berlin d’autoriser la livraison de chars Leopard 2. «Les États-Unis vont envoyer 31 chars Abrams à l’Ukraine»,«dans la droite ligne de nos efforts en vue de fournir à l’Ukraine les capacités dont elle a besoin pour continuer à mieux se défendre», a annoncé mercredi un haut responsable américain, après des semaines de tergiversations.
Le calendrier de livraison n’est pas encore fixé, et il pourrait falloir plusieurs mois avant que les chars soient effectivement déployés.
À lire aussiGuerre d’Ukraine: pourquoi Kiev demande des chars Léopard 2
La décision semble avant tout destinée à sortir du blocage diplomatique avec l’Allemagne. Elle constitue aussi un revirement supplémentaire de la part des États-Unis, qui avaient jusqu’à présent refusé de livrer ces chars d’assaut à l’Ukraine. Comme pour d’autres systèmes d’armes auparavant, d’abord refusés avant d’être finalement livrés à Kiev, le Pentagone avait invoqué de nombreux prétextes. «Le tank Abrams est un équipement très compliqué. Il est cher. Il est difficile de s’entraîner dessus… Ce n’est pas le système le plus facile à entretenir», avait dit la semaine dernière le sous-secrétaire à la Défense, Colin Kahl, responsable des questions politiques au Pentagone, après sa rencontre à Kiev avec le président ukrainien. Le secrétaire à la Défense, Lloyd Austin, avait aussi exprimé son refus: «Nous ne devrions pas fournir aux Ukrainiens des systèmes qu’ils ne peuvent pas réparer, qu’ils ne peuvent pas entretenir et qu’ils ne peuvent pas se permettre à long terme, parce que ce n’est pas utile.»
Les spécialistes n’étaient pas tous convaincus par ces explications. Le char Abrams est un char en service depuis plusieurs décennies dans de nombreuses armées, notamment au Moyen-Orient. Les forces irakiennes, qui l’ont employé dans la reconquête de leur territoire contre l’État islamique, ne disposent pas d’une logistique particulièrement sophistiquée. L’engin est par ailleurs propulsé par une turbine capable de fonctionner avec toutes sortes de carburants, allant du kérosène au diesel.
À lire aussiINFOGRAPHIE – Leopard 2, Challenger 2, Abrams et Leclerc: découvrez les chars qui pourraient briser les lignes russes en Ukraine
Dimanche, en rentrant d’un voyage à Kiev, le sénateur républicain Lindsey Graham, membre de la commission budgétaire, s’était dit exaspéré par les atermoiements des Occidentaux. «J’en ai assez de cette mascarade où l’on se demande qui va envoyer des chars et quand ils vont être envoyés», avait-il lancé dans une conférence de presse à son retour d’Ukraine. Il s’est dit, mercredi, «très heureux» du revirement de l’Administration démocrate. «En fournissant des chars, nous donnons à l’Ukraine de meilleures chances de repousser l’invasion russe et de reprendre le contrôle de son pays. Les chars ne sont pas conçus pour envahir la Russie ou déclencher la troisième guerre mondiale», mais pour «donner à l’Ukraine la capacité militaire de gagner sur le champ de bataille dans une guerre juste de libération de l’invasion russe».