Jusqu’à son transfert au RC Lens en juin dernier (contre 600.000 euros), Neil El Aynaoui a fait toutes ses classes au sein du club mythique de sa ville natale, l’AS Nancy Lorraine. Le Franco-marocain a intégré le centre de formation à l’âge de 8 ans pour gravir les échelons jusqu’à l’équipe première. Après des débuts professionnels en Ligue 2 lors de l’exercice 2021-2022, et un premier but inscrit face au Paris FC, il s’est imposé comme titulaire l’année suivante suite à la relégation de l’ASNL en National. «Neil, c’est un cadeau pour un entraîneur. Il est resté avec nous pour faire remonter le club. C’est quelqu’un de fidèle», a confié à son sujet Albert Cartier, coach de Nancy la saison passée. Le club lorrain n’est pas remonté en Ligue 2 mais a arraché in extremis son maintien en troisième division. En partie grâce au talent d’El Aynaoui, qui brille maintenant chez les Sang et Or.
C’est un nom que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître. Bien avant les prouesses de Neil en Ligue 1, son père, Younès El Aynaoui, s’est également illustré au cours d’une carrière sportive entre 1990 et 2008. Loin des pelouses et des crampons, le Marocain tapait dans la balle jaune sur les courts de tennis. 14e mondial à l’ATP en 2002, son meilleur classement, il a remporté cinq titres et atteint notamment le stade des quarts de finale à l’Open d’Australie. C’était le 22 janvier 2003 lors d’un match devenu mémorable face à Andy Roddick. Au terme du 5e set le plus long de l’histoire du Grand Chelem de Melbourne (2h23), El Aynaoui s’était incliné contre l’Américain (6-4, 6-7, 6-4, 4-6, 19-21) avant de rallier à nouveau les quarts d’un Majeur, quelques mois plus tard à l’US Open. Âgé aujourd’hui de 52 ans, le père de Neil n’a pas quitté le circuit professionnel puisqu’il entraîne le Français Hugo Gaston. Et suit évidemment de près la trajectoire de son fils ballon au pied.
Son père champion de tennis, le jeune Lensois aurait pu marcher sur ses pas mais a plutôt été contaminé par la passion du football, développée en Espagne au moment où la Roja a débuté son hégémonie avec son titre à l’Euro 2008. «On vivait à Barcelone pour mes entraînements, mais là-bas, les gars ne vivent que pour le foot, a raconté Younès El Aynaoui au journal l’Équipe . C’était logique qu’il s’intéresse au foot. J’ai tout de suite vu qu’il ne se fatiguait jamais. Il passait ses week-ends à jouer au foot.» Licencié pendant un an dans le club catalan du CF Gava (2008-2009), avant de déménager à Nancy, le milieu relayeur a donc trouvé sa voie de l’autre côté des Pyrénées. Un séjour qui explique sans doute sa qualité technique et sa précision dans la passe…
Possédant un double passeport français et marocain, Neil El Aynaoui a connu sa première sélection avec le Maroc olympique le 7 septembre dernier lors d’une victoire (1-0) face au Brésil olympique. Entré en jeu à la 89e minute, le Lensois pensait obtenir davantage de minutes quatre jours plus tard contre ce même adversaire, à Fès. Mais entre-temps, dans la nuit du 8 au 9 septembre, le terrible séisme frappant son pays a forcé l’annulation de la rencontre. «J’étais dans ma chambre d’hôtel, après avoir joué la veille face au Brésil. D’un seul coup, j’ai vu la télé de ma chambre se mettre à bouger, elle a même failli tomber, s’est souvenu le jeune international, interrogé par l’Équipe. Je suis sorti pour essayer de comprendre ce qu’il se passait, c’était la panique. Je ne pensais jamais vivre une catastrophe pareille pour ma première sélection.» Rappelé avec les U23 des Lions de l’Atlas en octobre, le natif de 22 ans espère disputer les Jeux Olympiques de Paris l’été prochain. Avec ses performances actuelles, il se donne en tout cas le droit de rêver.
Arrivé cet été dans l’ombre d’Andy Diouf et de Nampalys Mendy, le numéro 23 du RC Lens prend du galon semaine après semaine. Son entraîneur Franck Haise l’a d’abord utilisé avec parcimonie en lui offrant quelques entrées en jeu par-ci, par-là. Jusqu’à sa première titularisation intervenue lors de la 12e journée de Ligue 1 et la réception de l’Olympique de Marseille au stade Bollaert. Au cœur de l’ennui profond de la rencontre (remportée 1-0 par Lens), le natif de Nancy n’a pas raté son rendez-vous. «Il est remarquable à l’entraînement. À un moment donné, il fallait que je lui laisse l’opportunité de s’exprimer dès le début d’un match. J’ai confiance en lui et il a répondu aux attentes, s’est félicité Haise au coup de sifflet final. Il a fait un gros match défensivement et offensivement. Il a démontré beaucoup de personnalité. Cela fait vraiment un très long moment qu’il travaille bien, que ses entrées sont bonnes. C’est normal qu’il ait sa chance.»
Une chance parfaitement saisie par El Aynaoui, dans la foulée de son premier but inscrit en sortie de banc face au FC Nantes (4-0). Encore rayonnant samedi à Clermont (3-0), la révélation lensoise a maintenant rendez-vous à l’Emirates Stadium pour défier Arsenal en Ligue des champions (ce mercredi 21h). Une nouvelle étape importante dans son début de carrière très prometteur.