C’est un optimisme prudent mais un optimisme tout de même. Après avoir soldé l’année 2022 dans le vert, pour la première fois depuis 2008, le régime d’assurance-chômage prévoit de maintenir un excédent sur les trois prochaines années. Après 4,3 milliards l’an passé – un chiffre en légère baisse par rapport aux prévisions de novembre -, les projections de l’Unedic tablent sur un gain plus faible de 3,8 milliards en 2023, avant une accélération les années suivantes, pour atteindre 8,6 milliards d’euros en 2025. Une prévision qui, si elle se réalisait, serait un record « historique », souligne Jean-Eudes Tesson, le vice-président de l’organisme paritaire, qui gère le régime d’assurance-chômage.
Aucun triomphalisme cependant de la part de l’Unedic. Avant même de se féliciter des chiffres, les premiers mots de la présidente, Patricia Ferrand, ont été pour « la grande incertitude qui caractérise ces anticipations ». La situation économique actuelle, marquée par une forte inflation, un taux de croissance modéré mais un dynamisme du marché de l’emploi jamais vu, appelle à la prudence. Les inconnues comptent double du côté du marché de l’emploi : un pas de côté, à la hausse ou à la baisse, par rapport au scénario joue à la fois sur les dépenses (plus ou moins de personnes à indemniser), mais aussi sur les recettes (plus ou moins de cotisations). C’est ce qui explique les importantes variations de budget de l’organisme. Ce dernier est ainsi passé d’un déficit de 17,4 milliards en 2020, sous l’effet de la crise Covid, à un solde positif de 4,3 milliards d’euros deux ans après.
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L’embellie des chiffres de l’emploi est la première cause de l’optimisme affiché par l’Unedic. Selon ses anticipations, les créations d’emplois devraient repartir à la hausse après une légère stagnation en 2023. Elles ne s’approcheraient pas, pour autant, de l’année exceptionnelle qui vient de s’écouler ( 300.000 créations nettes en 2022, contre 6000 prévues en 2023 et 152.000 en 2025).
Autre facteur positif, la montée en puissance progressive de la réforme de l’assurance-chômage de 2021, qui durcit les conditions d’accès. Elle permet aujourd’hui des gains de l’ordre de 2,2 milliards d’euros par an.
La tant décriée réforme de la contracyclicité, qui prévoit une réduction de la durée d’indemnisation de 25 % si le taux de chômage se situe sous les 9 %, va mettre plusieurs années pour se faire sentir sur les comptes, mais son impact sera sensible. Il est évalué à 700 millions d’euros en 2023, avant d’accélérer progressivement. En 2025, son apport est ainsi évalué à 3 milliards d’euros, et jusqu’à 4,5 milliards d’euros d’économies par an en 2027.
Face à ce double effet combiné du marché de l’emploi et des réformes, les effectifs des chômeurs indemnisés devraient fondre pour passer de 2,44 millions de personnes sur les douze mois écoulés à 2,17 millions en 2025.
Mais « on se garde bien de parler d’excédent. On le fera lorsque la dette sera nulle », souligne le vice-président, défendant le principe que l’intégralité des bénéfices récoltés serve à résorber la dette de l’organisme. Cette dernière est en effet le point noir du tableau. Elle se monte encore à 55,5 milliards d’euros en 2023. Même si les prévisions de l’Unedic se révélaient aussi bonnes que prévu, l’endettement s’élèverait toujours à 42,2 milliards d’euros fin 2025. Un niveau toujours largement supérieur à celui de l’avant-crise. Sur les deux années de pandémie, l’assurance-chômage a déboursé environ 18,4 milliards d’euros pour limiter les effets de l’arrêt brutal de l’économie (via le chômage partiel). Une somme que l’Unedic continue de mettre de côté dans ses comptes avec l’espoir, mince, que l’État finira par le reprendre à sa charge. Les syndicats comptent d’ailleurs abattre cette carte lors des discussions sur la réforme de la gouvernance de cet organisme, qui vont prochainement commencer.
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