Voilà qui présage de belles et joyeuses empoignades au prochain festival de Cannes! On imagine déjà l’œil pétillant de Thierry Frémaux, le délégué général de la manifestation, lorsqu’il a demandé au cinéaste suédois doublement palmé (pour The Square et Sans Filtre) s’il acceptait cette périlleuse mission.
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La réponse de l’intéressé ne s’est pas fait attendre : «Je suis heureux, fier et empreint d’humilité de me voir confier l’honneur de présider le Jury du Festival de Cannes cette année, a déclaré Ruben Östlund à l’annonce de sa nomination. Nul autre lieu dans le monde ne suscite un tel désir de cinéma lorsque le rideau se lève sur un film en compétition. Quelle chance d’être là avec ces fins connaisseurs que sont les festivaliers de Cannes. Je pense sincèrement que la culture du cinéma traverse une période cruciale. Le cinéma est unique. On le partage. Cela nous renvoie quelque chose de tellement différent que cette dopamine sécrétée par le défilement des écrans individuels.»
En seulement six longs métrages, le cinéaste suédois a su creuser son sillon au cœur du paysage cinématographique mondial.
À Cannes, après deux sélections dans la section Un Certain Regard, Östlund fait son entrée en compétition officielle avec The Square en 2017. Il y met en scène une expérience artistique qu’il a menée dans son pays natal. Le film vient brillamment discuter les frontières de l’espace public, de l’art et de notre part animale. Le film obtient la palme d’or lors du 70e Festival de Cannes.
En 2022, Sans Filtre , son film suivant, orchestre la chronique d’un bateau de croisière pris dans une tempête qui rebat, dans un grand charivari poussant à la nausée, les cartes de la lutte des classes dans nos sociétés occidentales. Il sera honoré de la même manière en étant couronné par une deuxième palme d’or.
Ruben Östlund a toujours su creuser le sillon d’un cinéma joyeux et provocateur. Il n’aime rien tant qu’à poser une intrigue lui permettant d’examiner de manière sociologique les bas instincts de notre humanité, mais en y ajoutant une lampée d’humour corrosif. En invitant Ruben Östlund à la présidence du jury, le Festival de Cannes salue ainsi un cinéma sans concessions ni faux-semblants, appelant incessamment le spectateur à se questionner et l’art à continuellement se réinventer.
Après Francis Ford Coppola et Emir Kusturica, Ruben Östlund devient donc le troisième cinéaste doublement palmé à devenir président du jury. Et le tout premier à endosser ce rôle l’année suivant son sacre. «En tant que Président, conclut l’intéressé, je rappellerai à mes collègues du jury le rôle du cinéma. Un bon film se connecte aussi à l’expérience collective, il stimule la réflexion et donne envie d’en discuter. Alors, allons voir des films ensemble!»