Fragilisé par l’essor des plateformes de revente en ligne, le mouvement Emmaüs «contre-attaque» pour défendre son modèle solidaire: à travers de fausses annonces publiées jeudi sur Vinted, il appelle les utilisateurs à lui céder leurs vêtements usagés, plutôt que d’en tirer quelques euros sur internet.
Sur Vinted, une certaine «Emma_Us» propose pour cinq euros un T-shirt «vintage» proclamant «Si tu ne le portes pas, donne-le». Le vêtement n’est en fait «pas à vendre», mais destiné à «interpeller, sensibiliser, nous rappeler que donner à Emmaüs, c’est (se) donner le pouvoir d’agir, pour la solidarité, pour l’environnement», peut-on lire sur l’étiquette.
À travers cette campagne, déclinée également par affichage, à la radio et à la télévision, l’association fondée par l’abbé Pierre souhaite «provoquer un électrochoc» et amener les utilisateurs de Vinted ou autres Leboncoin à s’interroger, sans pour autant les culpabiliser, a expliqué Valérie Fayard, directrice générale déléguée d’Emmaüs France.
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Avec l’essor des plateformes de revente, les Français ont tendance à moins donner à Emmaüs, et surtout à lui donner désormais uniquement leurs objets de moindre qualité, déplore l’association. Après tri et réparation, seuls 40% des quelque 320.000 tonnes collectées chaque année peuvent être revendues, contre 60% il y a 20 ans, détaille Valérie Fayard.
C’est donc «tout notre modèle économique qui est mis en danger», a déploré la responsable, rappelant qu’Emmaüs permet à 15.000 compagnons ou salariés en insertion de retrouver une dignité par le travail, et que les plus démunis peuvent s’équiper à moindre coût dans ses 500 boutiques solidaires.
Ce caractère solidaire a «plus de valeur que les quelques euros que vous allez récupérer sur Vinted», a insisté Valérie Fayard. La plupart de ceux qui vendent en ligne «n’en ont pas véritablement besoin, ils génèrent des ressources pour s’acheter autre chose», participant ainsi à la «surconsommation», estime-t-elle.