Les prochaines heures seront surveillées comme le lait sur le feu par l’exécutif. Après le déclenchement du 49-3 à l’Assemblée nationale sur le compromis trouvé autour de la réforme des retraites, des rassemblements inopinés se sont tenus dans plusieurs villes de France jeudi soir. Certains étant d’ailleurs marqués par des épisodes de violence. De son côté, l’intersyndicale, qui s’est réunie dans la foulée, a appelé à «des rassemblements locaux de proximité» ce week-end et à une neuvième journée de grèves et de manifestations le jeudi 23 mars. Preuve que l’exhortation a été entendue : 200 manifestants ont momentanément bloqué le périphérique parisien vendredi matin, entravant la circulation sur ce dernier. Alors à quoi faut-il s’attendre dans les prochains jours ? Les Français seront-ils encore pénalisés par les blocages ? Quels seront les secteurs mobilisés ? Le Figaro fait le point.

Pour l’instant, les transports sont moins perturbés que la semaine dernière. Mais le secteur ferroviaire reste toujours sous la menace de blocages. Les quatre syndicats représentatifs de la SNCF ont d’ailleurs appelé vendredi à «maintenir la grève» entamée le 7 mars et «à agir massivement le 23 mars» pour s’opposer à la réforme des retraites. La CGT-Cheminots, l’Unsa-Ferroviaire, SUD-Rail et la CFDT-Cheminots invitent également les salariés du rail à «multiplier les actions et initiatives unitaires dès ce week-end dans tous les territoires».

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Vendredi, le trafic ferroviaire a été modérément perturbé avec deux TGV sur trois, et un TER sur deux. Pour ce week-end, «la circulation des trains poursuit son amélioration pour ce week-end mais restera perturbée». Trois TER sur cinq circuleront en moyenne, plus de quatre TGV sur cinq fonctionneront, et trois Intercités de jour sur cinq seront opérationnels. Quant à certains Intercités de nuit, la SNCF anticipe une reprise partielle de la circulation. Un service normal à quasi normal est à prévoir sur le RER E, et les lignes J, K, L, N, U ; trois trains sur quatre circuleront sur les RER A et RER B ; deux trains sur trois sur la Ligne H et un train sur deux sur les RER C, RER D fonctionneront. Dès vendredi matin, des manifestants ont envahi les voies de la gare de Toulon, bloquant le trafic durant une heure. Un coup de force qui pourrait se reproduire et que la SNCF a du mal à prévenir.

Si la situation s’est améliorée dans les métros en Île-de-France, les Parisiens doivent s’attendre à «une journée noire» jeudi 23 mars, selon FO-RATP, premier syndicat chez les conducteurs, qui dénonce «le déni de démocratie et le bras d’honneur envoyés à toute la population française». Dans le ciel, le trafic s’est normalisé vendredi, notamment à l’aéroport de Paris-Orly, et s’annonce sans perturbations notables durant le week-end. Mais la Direction générale de l’aviation civile (DGAC) a demandé aux compagnies aériennes d’annuler lundi 30% de leurs vols à Paris-Orly et 20% à Marseille-Provence. «En dépit de ces mesures préventives des perturbations et des retards sont néanmoins à prévoir», a prévenu la DGAC vendredi.

À Gonfreville-l’Orcher, dans la Manche, les salariés grévistes de TotalEnergies «ont haussé le ton», selon Éric Sellini, coordinateur CGT. «Les principales unités commenceront à s’arrêter à partir de demain (samedi)» et «normalement, la raffinerie sera arrêtée ce week-end ou lundi au plus tard», a-t-il prévenu.

La menace d’un arrêt des raffineries est brandie par la CGT pour in fine assécher les stations-service. Stopper une raffinerie est complexe, la direction peut s’y opposer. Près de Marseille, la raffinerie de Petroineos où le travail avait repris jeudi, est menacée d’arrêt total «au plus tard lundi après-midi», selon Sébastien Varagnol, délégué CGT. «Les expéditions de carburant sont arrêtées cet après-midi (vendredi), et ce week-end, on prépare l’arrêt total des installations, qui aura lieu au plus tard lundi après-midi», dit-il.

Les baisses de production se sont poursuivies dans l’électricité vendredi matin, sans impacts sur les clients mais affectant les finances d’EDF. «Les piquets n’ont pas été levés, au contraire ils ont été prolongés», selon la CGT, avec des baisses de production qui oscillent entre 15.000 et 20.000 MW depuis une semaine. «À 8h00, la baisse sur l’ensemble des moyens de production était de 8.170 MW», sans baisse dans le nucléaire, selon la direction.

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Le filtrage à l’entrée des sites se poursuit, selon Laurent Charletoux, délégué central CFDT à EDF : «On essaye de ne pas embêter le citoyen (…) mais le gouvernement devrait être inspiré de savoir ce qui pourrait se passer s’il poursuit dans la voie dans laquelle il est en ce moment». Côté gaz, le blocage des quatre terminaux méthaniers de France est entré dans son onzième jour, sans conséquence pour les clients selon GRTgaz. Le blocage se poursuit aussi dans les onze sites de stockage de gaz de Storengy, en grève depuis le 7 mars.

Au treizième jour de grève, la crise des ordures s’aggrave à Paris. Le seuil symbolique des 10.000 tonnes de déchets disséminés sur les trottoirs a été franchi vendredi midi, selon la mairie de Paris. Au-delà de la gêne, les risques d’insalubrité et d’insécurité pourraient conduire à des situations dangereuses dans la capitale.

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«La concentration de détritus, notamment alimentaires, fait courir des risques à la population, pose un problème d’hygiène publique et favorise la prolifération des rats, vecteurs de maladies», a souligné la préfecture de police de Paris, avant d’ajouter que «cet amoncellement favorise les risques d’incendie». Face à l’ampleur de la situation, les premières réquisitions de personnel ont eu lieu vendredi, au terme d’un bras de fer de plusieurs jours entre le gouvernement et la maire de Paris.