Il est presque minuit lorsque Gérald Darmanin franchit le pont de Bir-Hakeim, à Paris, dans la nuit noire et froide de ce premier week-end de décembre. Trois heures plus tôt, samedi, un terroriste islamiste, armé d’un couteau et d’un marteau, a tué un touriste germano-philippin et blessé deux autres personnes à deux pas de la tour Eiffel, dans le 15e arrondissement de la capitale. À Doha (Qatar), où il achevait une tournée express au Proche-Orient, Emmanuel Macron est informé de l’attentat par son aide de camp.
Il échange aussitôt avec le ministre de l’Intérieur, déjà sur place. Dans l’avion qui le ramène ensuite en France, le chef de l’État exprime «toutes (ses) condoléances à la famille et aux proches du ressortissant allemand décédé ce soir lors de l’attaque terroriste». Le Parquet national antiterroriste, qui s’est saisi du dossier, «aura la charge de faire toute la lumière sur cette affaire pour que justice soit rendue au nom du peuple français», ajoute le président dans son message publié sur X (ex-Twitter).
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À peine arrivé à Paris, dimanche matin, Emmanuel Macron décide de s’entretenir avec la première ministre, le ministre de l’Intérieur et le patron de la DGSI, Nicolas Lerner. L’occasion de procéder à un premier état des lieux, avant une autre réunion de sécurité, en fin d’après-midi. Présidé cette fois par Élisabeth Borne, le second rendez-vous vise à «faire un point de situation complet sur les dispositifs de sécurité en place» et «le parcours de prise en charge des individus les plus dangereux», ainsi que le résume Matignon.
Autour de la table: Éric Dupond-Moretti (Justice), Aurélien Rousseau (Santé), Olivier Véran (porte-parole), et Gérald Darmanin (Intérieur), qui en a ensuite rapporté la substance au «20 Heures» de TF1. «La France est durablement sous le coup de la menace terroriste islamiste. Il faut lutter très fortement contre l’islam radical», y a martelé le ministre de l’Intérieur. «Nous ne céderons rien face au terrorisme», avait déjà promis Élisabeth Borne, sur le même ton, dans un message sur X. À l’instar de la présidente de l’Assemblée, Yaël Braun-Pivet, d’autres voix s’étaient élevées toute la journée durant pour réclamer l’unité des Français afin de «lutter contre ceux qui attaquent nos valeurs».
Moins de deux mois après l’attentat d’Arras – qui a coûté la vie au professeur Dominique Bernard le 13 octobre -, cette nouvelle attaque a également suscité la colère et l’indignation de certains élus. Le patron de LR, Éric Ciotti, a ainsi dénoncé le profil récidiviste de l’assaillant «radicalisé, fiché S et déjà condamné pour des faits liés au terrorisme». Marine Le Pen a quant à elle exprimé ses «pensées pour les victimes cibles d’un terroriste fiché S et déjà condamné pour des faits en lien avec l’islamisme».
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Depuis l’Italie, où il rencontrait ce week-end ses alliés européens, le président du RN, Jordan Bardella, a de son côté accusé le gouvernement d’être «responsable d’une situation sécuritaire et migratoire (…) devenue totalement hors de contrôle». «Aujourd’hui, marcher sous la tour Eiffel, dans le cœur de Paris, c’est prendre le risque de mourir. Qu’ont-ils fait de notre pays?», a feint de s’interroger le chef de Reconquête!, Éric Zemmour.
À gauche, où les réactions ont été plus tardives, Jean-Luc Mélenchon s’est exprimé après être resté longtemps silencieux. Plutôt que de parler d’un acte terroriste, le leader Insoumis a dénoncé un «meurtre et des blessures au motif délirant de religion». «Le meurtrier est fiché cas psychiatrique, sous surveillance depuis un an après quatre ans de prison pour tentative d’assassinat», a-t-il poursuivi, en référence aux troubles neurologiques dont souffrirait l’assaillant. «Il est temps de réaliser les conséquences de l’effondrement du système psychiatrique!», en a conclu le troisième homme de la dernière présidentielle.
Plus tôt, le coordinateur de LFI, Manuel Bompard, avait appelé à «ne pas donner de signification politique générale» à l’attentat, commis selon lui par «une personne qui est manifestement déséquilibrée». Même avertissement chez les Écologistes, où Marine Tondelier a posé la question «des moyens et du suivi psychiatrique». Quant au PS, Olivier Faure a plus sobrement adressé ses «pensées et condoléances aux proches du touriste assassiné», et réaffirmé sa «reconnaissance aux policiers qui ont interpellé le terroriste».