Histoires de France. En décembre 1967, Jean Vuarnet, médaillé d’or de la descente des Jeux olympiques d’hiver de Squaw Valley, avait reçu la flamme des JO de Grenoble en provenance de Grèce à l’aéroport de Paris-Orly. En décembre 1991, la flamme des Jeux d’Albertville portée par le légendaire Jean-Claude Killy avait atterri avec le Concorde à l’aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle, avant de défiler sur les Champs-Élysées devant 200.000 spectateurs. Ce mercredi, à Marseille, en provenance d’Athènes comme le veut la tradition, la France retrouvera la flamme. Livrée par le Belem, légendaire trois-mâts, qui confiera la lumière allumée à Olympie le 16 avril et la chaleur transmise par la Grèce à la France à Athènes dans l’historique stade panathénaïque le 26 avril. Après avoir vogué. Comme en 1948 quand, pour les Jeux de Londres, la frégate britannique Whitesand Bay avait fait voyager la flamme.

Marseille, le trait d’union, va écarquiller les yeux, avant de s’embraser. Le Belem a dans ses cales et dans les cœurs des éclaireurs des souvenirs pour une vie après douze jours de traversée en passant par le canal de Corinthe, le détroit de Messine, après avoir aperçu le Stromboli en éruption, avant de voir se dessiner le littoral de Marseille et de recevoir sa fièvre. «On a le cœur large et les bras grands ouverts. Les valeurs de l’olympisme sont les valeurs du sport, Marseille en a besoin», assure Michèle Rubirola, adjointe au maire de Marseille.

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Marseille, cadre de dix matchs de football (autant de rencontres masculines que féminines) des tournois olympiques et théâtre des épreuves de voile. Marseille en fête. 150.000 personnes sont attendues et un important dispositif de sécurité a été déployé. Lors d’une gigantesque parade maritime (de 11 heures à 17 heures) dans la rade, le Belem sera escorté par plus de 1000 embarcations. Et le navire ajoutera un nouveau chapitre olympique à sa longue histoire, lui qui avait été invité par la reine Elizabeth II pour les JO de Londres en 2012.

Majestueux, le célèbre trois-mâts entrera, si le vent le permet, dans le Vieux-Port à 19 heures. Il viendra s’amarrer à une piste d’athlétisme flottante de 100 mètres. La lanterne précieusement conservée dans les entrailles du Belem allumera la torche qui sera présentée par le nageur Florent Manaudou. Le chaudron sera ensuite allumé à 19 h 40.

Marseille se posera comme le point de départ d’un fabuleux relais de soixante-neuf jours (jusqu’au 26 juillet, date de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques), avec 10.000 éclaireurs (1000 pour le relais paralympique du 25 au 28 août) traversant plus de 400 villes et 6 territoires ultramarins (touchés avec le relais des océans du 9 au 17 juin). La flamme va courir, marcher, faire du vélo, du surf, du cheval ou de l’escalade… Elle ne pourra empêcher les polémiques, les questions, les menaces de grève et les critiques mais elle va, avec émotion, donner la main, l’élan, le ton.

«Avec le relais, ce sont les énergies du sport, des territoires et du collectif que Paris 2024 veut transmettre et faire monter jusqu’aux Jeux olympiques avant de reprendre de plus belle avec le relais de la flamme paralympique, pour se conclure avec les premiers Jeux paralympiques d’été de notre histoire», résume Tony Estanguet, le président de Paris 2024. Un périple qui sera émaillé de «surprises», comme l’a annoncé Amélie Oudéa-Castéra, ministre des Sports et des Jeux olympiques qui va enchaîner quinze déplacements sur des étapes du relais. Au service des Jeux dans les territoires.

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Ce jeudi (jour de demi-finale retour de la Ligue Europa pour l’OM à Bergame), après avoir dansé lors d’un concert d’Alonzo et de Soprano pour clore une journée de fête, Marseille se réveillera les yeux cernés avec la lumière de la flamme. Avec au programme un relais qui s’étirera de Notre-Dame de la Garde au Stade-Vélodrome et verra défiler, comme relayeurs, les célébrités de l’OM, Jean-Pierre Papin, Basile Boli, Éric Di Meco, Didier Drogba, les basketteurs d’hier et d’aujourd’hui Tony Parker et Nando de Colo, Pascale Trinquet-Hachin (médaillée d’or au fleuret aux JO de Moscou en 1980), Denis Gargaud (champion olympique de canoë en 2016), le skateboardeur Vincent Matheron qui rêve des JO 2024, les anciens nageurs Fabien Gilot et Frédérick Bousquet, Emma Clair Dumont, la treizième femme à atteindre le sommet de l’Everest ou Alexandre Mazzia, le célèbre chef 3 étoiles.

Le lendemain, la flamme prendra la direction du Var. Début d’un long périple. Sur la route de Paris, elle visitera ensuite le viaduc de Millau (13 mai), la grotte de Lascaux (22 mai), les plages du débarquement (30 mai), le Mont-Saint-Michel (31 mai), montera les marches du Palais des festivals à Cannes (18 juin) ou le mont Ventoux (19 juin). Avant d’illuminer Cabourg (le 30 mai), les Sables-d’Olonne (4 juin), Vannes (6 juin) ou Strasbourg (26 juin). Avec chaque jour le même schéma, quatre villes traversées par un «convoi engagement» et trois sites visités par un «convoi agile».

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À chaque fin de segment, la flamme est placée dans une lanterne pour être transportée jusqu’au segment suivant. Et pour clore chaque journée, le chaudron (conçu, comme la torche et la vasque, par Mathieu Lehanneur) qui est, selon son créateur «un symbole de fraternité, objet autour duquel on va se rassembler tous les soirs», sera allumé par le dernier porteur de flamme dans un site où de nombreuses festivités auront été organisées (initiations sportives, concerts, spectacles, rencontres…). Chaque relayeur recevant en souvenir un anneau, «le cœur de la torche».

Du théâtre antique d’Orange au vignoble de Saint-Émilion, du Musée de la bande dessinée à Angoulême à Chamonix (cent ans après les Jeux d’hiver), du pic du Canigou à l’Île-aux-Moines ou aux aiguilles de Bavella… la flamme va proposer un voyage historique, sportif, culturel. Une succession de cartes postales pour ouvrir en grand la porte des Jeux…