Ensoleillée, la quinzaine a été éclairée par un sourire. Celui que Carlos Alcaraz promène en permanence en bandoulière. Il a l’éclat et l’insouciance de la jeunesse. Il diffuse une chaleur et un éclat contagieux qui se répandent loin des lignes du court. Roland-Garros a vu passer et follement aimé le bandeau de Björn Borg, le diamant à l’oreille de Victor Pecci, les dreadlocks de Yannick Noah, le service à la cuillère de Michael Chang, le short en jean d’André Agassi, le pantacourt de Rafael Nadal ou les entrechats de Roger Federer, avant de tomber sous le charme d’un sourire. Peint sur un visage à peine sorti de l’adolescence. Porté par un joueur qui joue comme il vit. Pour le plaisir du jeu. Une attitude qui attire les regards comme un aimant, fascine.

«Je n’ai jamais vu un joueur de ce niveau prendre autant de plaisir que toi», a, bluffé, confié Mats Wilander à Carlos Alcaraz qui assure : «Le sourire est, pour moi, la clé de tout. Juan Carlos (Ferrero, son entraîneur) me dit toujours que l’important est de s’amuser. J’essaie de ne pas prendre les choses trop au sérieux. J’essaie d’oublier tout ce qui est sérieux et d’apprécier ce que je fais sur le court».

À lire aussiRoland-Garros 2023 : Alcaraz «se déplace comme Speedy Gonzales», observe Tsitsipas

Quand certains s’avancent et s’expriment les sourcils froncés, les yeux cernés, traînent l’air fatigué de joueurs hantés, usés par l’urgence du résultat, Carlos Alcaraz (20 ans) rappelle que le tennis est et reste un jeu. Les lignes sont restées les mêmes que celles qui ont encadré son enfance et ses rêves. Un détachement qui, sur le circuit, infuse. «Un jour à l’entraînement, je lui ai dit merci. Je dois beaucoup à  »Carlito », parce que c’est un souffle d’air frais. Il a vraiment envie de gagner mais il a toujours le sourire. Il a tellement de charisme, d’énergie positive qu’il distribue à tout le monde. Cela contribue d’ailleurs à son évolution et sa constance en tant que joueur. L’année dernière, j’ai voulu l’appliquer dans mon jeu et pas obligatoirement sur les aspects techniques… Je l’admire pour ce qu’il est. C’est la raison pour laquelle je suis plus heureux, plus content lorsque je joue au tennis, grâce à lui», révèle Stefanos Tsitsipas.

Sourire, pour s’ouvrir. Offrir. Vent coupant comme une lame de rasoir, soirée de fièvre ou nuit plus fraîche, rien ne vient faner le sourire de Carlos Alcaraz. Après avoir vécu au rythme des exploits du trio composé de Roger Federer, Rafael Nadal et Novak Djokovic, la planète tennis obsédée par la course aux records se demandait ce qu’elle allait être en mesure de proposer. Avant de se laisser emporter par le charme, le plaisir et l’envie d’un sourire enfantin. Contagieux. Libérateur. «Je suis un grand fan. Il est très humble par rapport à ses réussites à un si jeune âge. On voit à tel point il s’amuse sur le court. Ce n’est une position facile d’être numéro 1 à un si jeune âge. Ça fait beaucoup de bruit, et donc je l’admire», sourit Denis Shapovalov.

Carlos Alcaraz qui, depuis son adolescence, avance avec le poids des comparaisons avec Rafael Nadal a su orner son ascension et ses performances d’un œillet à la boutonnière. Porté avec grâce, comme les fragrances d’un parfum subtil. Un sourire précieux dans un environnement souvent bouclé à double tour où les émotions sont cadenassées, à part pour hurler après un point marqué. La variété des coups de l’Espagnol, la vitesse sidérante de ses courses sont louées, les (éventuels) progrès disséqués. Mais le plus précieux est ailleurs. Antonio Martínez Cascales, co-entraîneur du prodige a expliqué à Mundo Deportivo : «Nous ne lui demandons pas de gagner un autre Grand Chelem cette année. Il va essayer évidemment. Nous lui demandons seulement de continuer à jouer comme il le fait, de rester comme il est, sur et en dehors du court. C’est l’une des clés. Quand il ne sourit pas, nous lui disons de sourire. Si on veut qu’un joueur dure, c’est encore plus fondamental.» Tôt dans sa carrière, Roger Federer a pris soin de son physique. Carlos Alcaraz doit, lui, faire attention à son sourire. Pour que son jeu s’exprime en toute liberté…