L’aérienne Orlane Kanor a repris son envol. Après avoir manqué les JO 2021 sur blessure, l’arrière gauche à l’impressionnante détente verticale et à «la maturation un peu tardive» s’affirme encore un peu plus comme la principale, et un peu seule il faut bien le dire, menace longue distance des Bleues. Ainsi, ses quatre buts contre la Norvège (24-23) avaient été essentiels dans le petit exploit réalisé par l’équipe de France, qui restait sur trois défaites en compétition face aux Scandinaves, à l’issue du tour principal. «C’était génial, j’ai pris beaucoup de plaisir, eu des situations de shoots assez ouverts. J’ai vraiment pris mes responsabilités et ça m’a fait du bien. Les filles ont fait aussi en sorte que je puisse avoir ces solutions. Je vais bien et ça se passe bien», se réjouissait-elle alors devant la presse dans les couloirs du Spektrum. Un succès qui avait permis aux joueuses d’Olivier Krumbholz d’éviter de croiser la route des Néerlandaises en quarts, pour une pente moins escarpée avec la République tchèque, facilement écartée (33-22).
Le sélectionneur avait également salué la performance de sa joueuse, de plus en plus importante dans son dispositif offensif après un Euro 2022 déjà en pente ascendante : la Guadeloupéenne de 26 ans est «le bras de l’équipe de France», le seul capable de décocher des flèches à neuf mètres ou plus, selon le Messin. Elle figure d’ailleurs parmi les meilleures joueuses de la compétition à longue distance (18 buts sur 29 tentatives), faisant planer une menace constante sur les défenses adverses : quand elle ne prend pas sa chance, elle oblige ces dernières à monter, ce qui peut libérer des espaces dans leur dos. «Je pense que j’arrive peut-être à maturité. Je suis plus calme, moins fofolle surtout, plus juste dans mes choix», commente-t-elle. Même si sa performance en quarts, un 2 sur 5 au tir, signifie que tout n’est pas encore parfait, loin de là.
Orlane Kanor (1,78 m), appelée jeune en sélection dès 2017, a «encore une très belle marge de progression», avoue d’ailleurs Krumbholz, qui l’utilise également de plus en plus en défense. Cette progression avait été brutalement stoppée par une rupture du tendon d’Achille gauche en avril 2021, à quelques mois des Jeux olympiques de Tokyo. Une saison quasiment blanche plus tard, elle quittait à l’été 2022 son cocon de Metz, où elle était arrivée à l’âge de 18 ans en provenance de Guadeloupe, pour le Rapid Bucarest. Un départ forcé – «j’aurais aimé rester à Metz» – dont elle a profité pour «se mettre en danger, grandir, voir un autre style de jeu». Elle a cependant mis un peu de temps à faire «le deuil de (ses) entraînements» à Metz sous la houlette d’Emmanuel Mayonnade: le club roumain est moins structuré, les entraînements moins poussés. «Je ne courais pas assez, il n’y avait pas assez de mouvement, les tactiques n’étaient pas assez précises», raconte-t-elle à l’AFP.
Mais quand elle a «accepté» de vivre une expérience différente à Bucarest, «un poids est parti, il y a eu un déclic», se souvient-elle: «Je me suis sentie plus libre». Plus importante dans l’équipe aussi, rouage essentiel du Rapid Bucarest, engagé en Ligue des champions, au point d’en être nommée capitaine cette saison. «Cela m’a fait prendre confiance en moi», estime Kanor, rejointe cet été dans le club roumain par sa jumelle, l’ailière gauche Laura, pas encore internationale. Orlane, elle, ne «pense pas trop» aux JO de Paris après le coup du sort de sa blessure en 2021 : «J’espère simplement pouvoir prétendre être dans le groupe, défendre ma place, avancer tranquillement sans blessure.» C’est pour l’instant le cas. Et l’arrière gauche est attendue au tournant ce vendredi (21h00) face à la Suède, un sérieux morceau sur le plan défensif que le bras de l’ancienne Messine aura pour mission de fissurer petit à petit. Histoire pour elle de vivre une troisième finale mondiale après celle remportée en 2017 et celle perdue il y a deux ans. Jamais deux sans trois, le refrain est connu.