On s’en doutait un peu. Avec le ralentissement du commerce mondial, CMA CGM qui avait été l’entreprise la plus profitable de France en 2022 (24,9 milliards de dollars de bénéfices) ne va pas rééditer cette performance cette année. Au premier semestre de l’année, il a divisé ses profits par cinq, à 3,3 milliards de dollars de résultat net, contre 14,7 milliards à la même époque de l’an passé. Attention, le troisième armateur mondial ne va pas mal : au premier semestre, il a encore engrangé 3,3 milliards de dollars de profits. Rien à voir avec la situation d’avant-Covid : en 2019, il avait perdu sur la même période 152 millions de dollars.
Et, à force de multiplier les acquisitions (terminaux portuaires, Gefco, Ingram Micro CLS, Colis Privé…), le groupe marseillais a changé de dimension. Au premier semestre, il a réalisé un chiffre d’affaires de 25 milliards de dollars contre 15,1 milliards en 2019, l’année avant-Covid. Simplement, il n’a plus les résultats stratosphériques qu’il affichait pendant la pandémie où les coûts du transport maritime s’étaient envolés. « Comme attendu, notre industrie a poursuivi sa normalisation au deuxième trimestre », commente sobrement dans un communiqué Rodolphe Saade, PDG de CMA CGM. Il y a quelques mois, il avait été plus disert sur le sujet : « Après deux années exceptionnelles, notre industrie est rentrée dans une phase de normalisation liée au ralentissement de la croissance mondiale, à l’inflation et à un phénomène de déstockage qui se poursuit un peu partout dans le monde », soulignait-il alors.
Du coup, le groupe marque le pas cette année : ventes, Ebitda, résultat net… tous ses indicateurs sont en recul spectaculaire au premier semestre par rapport à l’année dernière. Ainsi, son chiffre d’affaires a baissé de plus de 33% à 25 milliards de dollars. La baisse s’est même accentuée au deuxième trimestre (- 36,9%).
Et la glissade aurait été plus spectaculaire si CMA CGM n’avait pas accentué sa diversification. Au deuxième trimestre, son activité historique, le transport de marchandises en porte-conteneurs, a reculé de 47,9% quand la logistique, moins sujette aux à-coups, est restée stable. Ce deuxième pôle devrait encore se renforcer : CMA CGM s’est mis d’accord avec Bolloré il y a quelques semaines pour lui racheter sa division Bolloré Logistics. l’armateur paiera 4,7 milliards d’euros pour acquérir cette entreprise qui a réalisé l’année dernière un Ebitda de 437 millions d’euros pour un chiffre d’affaires de 7,1 milliards d’euros). Le temps d’avoir les autorisations de toutes les autorités de la concurrence concernées, le roi des porte-conteneurs devrait contrôler Bolloré Logistics au plus tôt à la fin de l’année. Cela lui permettra de devenir le cinquième logisticien mondial alors qu’il n’est que le sixième aujourd’hui.
En attendant, CMA CGM ne s’attend pas à un rebond de son activité au second semestre. Selon les experts, l’économie mondiale devrait connaître une croissance très modérée. Et les nombreuses livraisons de porte-conteneurs attendues d’ici la fin de l’année ne font pas anticiper une remontée des prix du transport maritime. Pas de quoi inquiéter outre mesure CMA CGM qui au cours des deux derniers exercices a empoché plus de quarante milliards de dollars de bénéfices.